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- Laure CHEVALIER : entre code et couleur, entre logique et lumière
Cette rencontre avec Laure CHEVALIER fut en ce jour du 29 juin 2025 au pavillon du Verdurier, en plein cœur de Limoges, une véritable bouffée régénérante, un ping-pong d’échanges vivifiants. Je vous transcris nos propos sous la forme d’une prose en liberté à l’image de cette artiste qui ne cherche ni la ligne droite ni la conformité et où l’on perçoit immédiatement que rien, chez elle, n’est tiède ni convenu. Cropped logo (digital art) ©Laure CHEVALIER Science et peinture : le grand écart fertile Elle est de ces profils rares, difficilement résumables. Biologiste de formation, informaticienne de métier, peintre par nécessité intérieure, Laure Chevalier incarne une sorte de tension féconde entre rigueur rationnelle et créativité débridée. Depuis 2003, elle évolue dans l’univers structuré de la Banque Postale. Son CV est une spirale ascendante dans l’univers des technologies : ingénieure Software développement, chargée de mission – application repository manager – ScrumMaster junior, cheffe de projet monétique, jusqu’à son rôle actuel de responsable 3DS pour les paiements en ligne. Un poste exigeant, minutieux, exigeant de la précision dans chaque décision, du calme dans la tempête. Mais en parallèle, un autre monde s’agite. Un monde silencieux, intérieur, souvent tenu secret pendant des années, qu’elle révèle peu à peu. Ce monde-là est peint, esquissé, rêvé ; un subtil mélange d’art digital et de peinture à l’huile. Une vocation contenue Gamine déjà, elle dessinait. Plein de gribouillis sur les murs de sa chambre. Tellement que ses parents ont dû retapisser. Il y a chez elle ce geste qui ne demande pas d’autorisation, ce besoin de tracer, de représenter, de s’exprimer — sans autre médiation que le crayon levé. Un souvenir de dernière année d’école maternelle flotte, celui d’un professeur d’arts plastiques. Mais ensuite ? Aucun encouragement, aucun signal. Une filière scientifique choisie par raison. Elle parle aujourd’hui, sans amertume mais avec lucidité, de ces phrases entendues trop souvent : « T’en feras rien. » « Faut faire quelque chose de sérieux. » Des phrases qui sonnent encore, longtemps après. Le résultat ? Un jardin secret, un monde intérieur resté en jachère trop longtemps. Elle confie aujourd’hui quelques regrets de ne pas avoir osé, de ne pas avoir intégré une école d’art plus tôt, de ne pas s’être opposée à certaines injonctions. Mais aujourd’hui, elle peint. Et elle parle. Elle se dit « esprit Renaissance » , curieuse insatiable, toujours entre deux mondes. Le seuil (huile) ©Laure CHEVALIER 2015 : l’année du basculement À l’École Nationale Supérieure d’Art et de Design de Limoges, elle suit des cours en parallèle de sa vie professionnelle. Romain Larbre l’aide à sortir de sa « zone de confort créative ». Sa première immersion dans un atelier public de peinture à l’huile, en 2015, est une épiphanie : « Jamais je ne me suis sentie autant à ma place, en phase. Instinctivement je savais quoi faire. » Il ne s’agissait pas d’apprendre, mais de retrouver quelque chose, une mémoire sensorielle peut-être, un geste enfoui, une connexion … Avant cela, pendant une dizaine d’années, elle crée déjà, en bénévole des visuels pour l’association EnDanse, des flyers, des affiches, des supports numériques. Le digital, elle continue à l’utiliser, pas en œuvre finale mais en traitements intermédiaires, en prémaquettes comme travail préparatoire. Elle y revient quand le temps manque, quand l’huile demande cette lenteur qu’impose son séchage. « Quand t’es pas sûr de ton idée, plutôt que d’investir dans du matériel, le numérique est bien pratique. » Le digital lui permet de maintenir le fil, de ne pas perdre le souffle créatif entre deux temps de vie, entre deux obligations professionnelles. Mais pour l’œuvre finale, c’est bien à la peinture qu’elle revient : cette matière vivante, indocile, profonde. Un univers pictural fait de seuils, de décalages, d’énergies contradictoires Des récurrences dans son discours pictural : passage, transition, changement d’état. Il y a dans ses toiles un monde en perpétuel basculement. Des seuils franchis. Cette captation de moments où l’ombre passe à la lumière et réciproquement : « Chaque moment est un lieu et chaque lieu est un moment. » Ses œuvres saturées de couleurs primaires explosent d’énergie, comme une réponse à l’austérité du quotidien. Cadrages dynamiques, souvent proches de l’instant capturé. Licornes, symboles d’espoir, de réenchantement. Boxeuses tendres serrant des peluches. Des interprétations non-manichéennes où elle « fuit comme la peste les idées tranchées », les « émotions brutes », elle préfère instiller dans ses réalisations de subtils détails, parler de l’humain dans sa normalité, dans ses nuances. Sa technique picturale la pousse vers un réalisme poussé, ses tableaux flirtent avec l’hyperréalisme. Elle admire ces artistes qu’elle appelle des « imprimantes sur pattes », mais sourit en disant que ses verres progressifs l’empêchent d’atteindre ce niveau de technique ! Elle cite Magritte, Pollock, Frida Kahlo et aussi Boulet, le dessinateur-blogueur, pour l’humour et la tendresse du quotidien. Une œuvre en mouvement, une parole qui s’affirme L’artiste oscille encore, comme une aiguille entre deux pôles : faut-il faire des œuvres esthétiques, lisibles, reconnaissables, faciles à identifier ? Ou au contraire, se laisser porter par l’instinct, au risque de la dispersion ? Elle sait ce qu’on lui conseille : faire « des œuvres de la même veine », reconnaissables. Mais elle n’en a pas envie. Dans sa série des « Invisibles », des personnages sans tête, elle cherche à transmettre l’universalité, à effacer les identités trop marquées. Le mouvement fonctionne, dit-elle, mais les vêtements trahissent encore les genres. Rien n’est simple. Elle refuse en bloc le cliché de l’artiste maudit : « Est artiste celui ou celle qui accepte de mourir de faim ? » Son credo est à l’opposé : « Chaque être humain porte en lui un minimum de créativité. » Créer n’est pas un privilège, c’est une faculté humaine. Pas besoin d’autorisation pour créer. Pas besoin d’étiquette. Pas besoin de permission pour peindre ce qui déborde. Laure Chevalier est à la fois femme de chiffres, peintre instinctive et singulière, funambule entre ombre et lumière. Interview de Laure Chevalier par Pierre Raffanel - juin 2025 « Déesses contemporaines » Tiamat - Badhbh - Lethe - Lamasthu - Yavanna - So childish 2 - So childish "Hug me we're humans" - Nehalennia la boxeuse- Zeleia ( huiles) ©Laure CHEVALIER Une série picturale de Laure Chevalier librement inspirée de mises en scène photographiques réalisées avec de proches amies. Cette série de portraits réinvente les figures mythologiques féminines à travers une relecture contemporaine, intime et engagée. Le travail de l’artiste mêle technique picturale, exploration des textures et regards croisés entre Histoire, mythe et vécu personnel. Dans cette galerie de « déesses contemporaines », chaque figure convoquée — qu’elle provienne des panthéons anciens (babylonien, grec, celte, mésopotamien) ou d’univers fictionnels (Tolkien) — devient le support d’un questionnement sur la représentation féminine, le pouvoir, la mémoire et la résistance. Ici, les femmes ne sont plus muses, objets, ou simples symboles : elles sont actrices, puissantes, parfois monstrueuses, toujours souveraines. « Les dés sont pipés depuis des millénaires », affirme l’artiste. À la croisée du féminisme, du mythe et de l’expression plastique, ses « Déesses contemporaines » proposent une relecture puissante et poétique des archétypes féminins, comme autant de contre-récits face aux silences de l’Histoire. TIAMAT , matrice originelle et chaos sacré, mère de tous les dieux, déesse babylonienne, personnification des eaux primordiales. BADHBH , déesse corneille de la guerre celte. YAVANNA , nourricière fictive et Reine de la Terre. LETHE , déesse grecque, allégorie de l’oubli et du passage. LAMASHTU , démone mésopotamienne des douleurs occultées. NEHALENNIA , divinité maritime protectrice : chacune devient figure-totem, incarnation d’un combat, d’un souvenir ou d’une émotion partagée. ZELEIA , cité oubliée de la Troade. En contrepoint, SO CHILDISH , première huile de l’artiste, s’élève comme un manifeste. Née de la stupeur et de l’indignation face à la première élection de Donald Trump, la boxeuse tend ses bras : « Hug me, we’re humans » — « Serre-moi dans tes bras, nous sommes des humains ».Une invitation à la tendresse, mais aussi à la lutte. Une fragilité armée. « Les invisibles » La dame aux couleurs - Spirits in the sky - Le banc - Breaking - L'année venait à peine de commencer - Anaérobie - Prochaine séance ( huiles) ©Laure CHEVALIER
- Fresque de Roger Pendariès
Fresque de Roger Pendariès - tryptique situé au Crec Toulouse ©2025 photo Pierre Raffanel ¶ Patrimoine postal ¶ Clin d’œil à la fresque de Roger Pendariès lors d’une visite impromptue du Centre de Relation et Expertise Client de Toulouse, rue Palaprat lors des Journées du Patrimoine 2025. Ravi de constater la préservation de cette fresque lors des travaux de réfection de la cantine du Crec grâce à l’action concertée de Jean François Bessoles et à la mobilisation de l’association Société Artistique Midi-Pyrénées et d’Alain Aost. Le Centre régional des services financiers de Toulouse fut créé en 1956 par l’architecte toulousain, Paul de Noyers. Dès 2015 la Banque Postale lance une refonte et une restructuration de ses centres financiers qui seront renommés Centre de Relation et d’Expertise Client. ¶ Historique de la réalisation de la fresque ¶ Trois maquettes proposées par l'artiste dans les années 70 : les abords de la Garonne au cœur de Toulouse, un paysage des Pyrénées Orientales et celle choisie par le directeur des Chèques postaux : plage de Saint Cyprien / Argelès-sur-Mer . Description de la fresque : tryptique (6.84m -2.88x3- sur 1,6m) – huile sur panneau composite bois – réalisée par le peintre postier Roger Pendariès sur une période de 3 mois. ¶ Parcours de l’artiste postier Roger Pendariès ¶ Roger Pendariès, authentique toulousain et peintre de la « couleur et du chant de la vie ». En 1943, à 14 ans, après son certificat d’études il entre dans l’administration postale comme télégraphiste. Dans les années 70, commandes par les PTT de grandes fresques : Chèques Postaux de Toulouse et les Télécoms d’Albi. En 1980 il réalise avec René Bonnefont la décoration de l’Office National des Annuaires à Bordeaux. En 1986 et 2005, invité d’honneur au Salon National de la Société Artistique au Musée de la Poste à Paris. Fêtera bientôt ses 97 ans… En savoir plus > chronique de Pierre Raffanel - revue Post’Art – mai 2022 Tryptique de Roger Pendariès - restaurant d'entreprise - Crec Toulouse La Poste - La Banque Postale ©2025 photo Pierre Raffanel
- Visites virtuelles du 49 Salon libre national de la Société Artistique en Châlonnie
©49 Salon libre national à l' espace culturel chapelle St-Memmie à Saint-Memmie et abbaye de Vinetz à Châlons-en-Champagne Retour en visites immersives 3D du 49 Salon libre national de la Société Artistique en Châlonnie et découvrez en "réalité virtuelle" 110 œuvres. 📍 Du 25 mai au 2 juin 2024 , 110 œuvres ont été exposées avec 100 artistes adhérent(e)s des 13 associations régionales de la fédération nationale de la Société Artistique de La Poste Groupe et Orange 🎨 Une exposition collective simultanément sur 2 sites d’exception : l’abbaye de Vinetz à Châlons-en-Champagne et à l’espace culturel la Chapelle St-Memmie à Saint-Memmie. ☀ Cette édition a permis une fois de plus de rendre visible les réalisations des artistes postiers, des échanges entre artistes « amateurs » et professionnels, et au plus grand nombre d’accéder à la création artistique. Ces 2 visites virtuelles sont une première pour la fédération nationale créée en 1902. Elles vous permettront sans nul doute de parcourir en autonomie, de revivre et/ou d'approfondir cette exposition collective, « contextualisée » par le biais de cette immersion 3D. Laissez-vous surprendre par ces parcours artistiques sur vos écrans (téléphone, tablette, ordinateur), parcourez-les tout simplement par curiosité et venez admirer virtuellement ces 110 œuvres exposées dans ces 2 lieux patrimoniaux du département de la Marne. 👏 Un grand merci aux partenaires pour leur soutien dans la réalisation de ce 49 Salon libre national : COGAS de La Poste, département de la Marne, mairie de Châlons-en-Champagne, mairie de Saint-Memmie et le champagne Jean Baptiste Martin. 🤝 Curation nationale Pierre Raffanel curation régionale François Vigneron pour la SA Champagne Ardenne et réalisation des visites virtuelles Carlos Ansiaes. Post de Pierre Raffanel le 20 août 2024
- David DECOBERT, le pastel à l'honneur
Le pastelliste - David DECOBERT (pastel) À la rencontre de David DECOBERT, artiste pastelliste talentueux et facteur, postier à Roissy-en– Brie en banlieue parisienne. Interview de Pierre Raffanel pour la revue POST’ART # 229 - juin 2025 Pierre Raffanel : « Il était une fois… Un Roi ! s'écrieront aussitôt mes petits lecteurs. Non, les enfants, vous vous trompez. Il était une fois un morceau de bois. » …ainsi commence l'interview. Ces mots sont en préambule de l’histoire de Pinocchio, ce personnage de fiction du livre éponyme du journaliste et écrivain italien Carlo Collodi. Peux-tu m’expliquer la récurrence de Pinocchio dans tes oeuvres ? Est-ce un choix délibéré ? David Decobert : Pas vraiment. C’est une marionnette que m’a offerte mon père quand j’étais enfant, dans ma dixième année. Je ne jouais pas spécialement avec et « à la limite, elle me faisait presque peur ! » Puis j’ai commencé à dessiner, je cherchais un sujet et naturellement elle m’a servi de modèle une première fois...ensuite, elle est devenue une source inépuisable d’inspiration. Au fil du temps et au gré de mes envies, Pinocchio revient régulièrement. PR : Tes débuts d’artiste, très jeune apparemment ? DD : J’ai toujours dessiné. Mais tu ne me poses pas la bonne question. La bonne question c’est : « Vous, c’est quand que vous vous êtes arrêté ! ». En fait, tous les enfants dessinent, certains ne s’arrêtent jamais. Avec plus ou moins d’assiduité, j’ai toujours été attiré par l’artistique et la chose créative. PR : Et le déclic de ta passion du pastel ? DD : A la fin des années 90. J’étais facteur et sur ma tournée il y avait un pastelliste de métier, Chris. Il faisait partie de la Société des Pastellistes de France qui avait organisé cette année-là une exposition à la Grande Halle de Roissy-en-Brie. J’ai été impressionné par cette technique, j’ai acheté ma première boîte de pastels et j’ai commencé, seul, mon apprentissage. PR : Tes premiers tableaux ont-ils été réalisés avec minutie dès le début ? DD : Oui car je suis minutieux de nature, exigeant et perfectionniste. J’ai toujours fait des oeuvres très précises, je me suis juste amélioré au fur et à mesure de ma pratique. Je me suis également documenté et j’ai pas mal fréquenté les musées. PR : En parallèle de ton métier de postier ? DD : Exactement, facteur. Enfin pour quelques mois encore, car je suis en temps partiel aménagé sénior (TPAS en « sigle postal ») et mon activité de distribution va s’arrêter complètement fin août. Je serai en préretraite et je pourrai me consacrer pleinement à mon activité artistique. J’ai eu un bac de comptabilité gestion. J’ai pratiqué deux semaines ! J’ai passé en 1990 le concours de facteur à La Poste et celui de contrôleur auquel j’ai eu une note éliminatoire. Avec du recul, je m’en réjouis maintenant car je n’aurais pas aimé l’évolution de ce métier. En étant facteur, j’ai pu, jusqu’à récemment, avoir une activité épanouissante. Au fil des années, les tournées sont devenues de plus en plus longues à cause de la baisse du trafic courrier, et ces derniers mois, l’arrêt du tri le matin et le passage en méridienne ont rendu ce métier plus difficile à mon goût. PR : As-tu toujours eu ta tournée de facteur sur la commune de Roissy-en-Brie ? DD : Quasiment. J’ai été nommé à Noisy-le Grand en Seine-Saint-Denis. Au début, j’étais remplaçant sur les tournées à découvert, puis j’ai été titulaire d’une même tournée. Puis après mes 2 ans d’affectation, j’ai demandé une mutation à Roissy-en-Brie. Double goutte pour double pente - David DECOBERT (pastel) PR : As-tu « acheté » un quartier et peux-tu m’expliquer comment cela s’est déroulé ? DD : A l’époque, deux fois par an, il y avait une « vente de quartiers ». Des quartiers se libéraient suite à des départs en retraites, des mutations…et à l’ancienneté, on postulait pour l’acheter. « Acheter » était le terme consacré car il n’y avait pas de réelle monétisation, juste un peu d’excitation provoquée par le souhait d’avoir la tournée désirée. PR : Ton temps passé à peindre a-t-il évolué avec le temps ? DD : Oui dès le moment où j’ai commencé à faire des salons dédiés au pastel en plus des expositions locales, encouragé par une amie pastelliste Nathalie Murat. Mon premier salon fut celui de Giverny en 2015, qui depuis a déménagé à Berric dans le Morbihan. Par la suite, j’ai été sollicité par différents organisateurs. PR : Tu utilises des pastels secs, peux-tu m’expliquer ta manière de les usiter ? DD : J’ai une particularité : je taille mes bâtons de pastel en pointe ou du moins de façon à avoir une arête tranchante pour obtenir une netteté dans mon trait. Ensuite je récupère la poudre que j’ai taillée, je la broie, je la passe au tamis, je remets un peu d’eau, je la roule et ainsi je reconstitue des bâtonnets plus fins de pastel. PR : Tu rajoutes un peu de fixatif ? DD : Légèrement à la fin de mes réalisations pour stabiliser la poudre. PR : As-tu des formats de prédilection pour tes tableaux ? DD : Plus c’est petit, plus je suis à l’aise. Mais depuis quelque temps je fais des formats plus grands : des 70x70cm. J’utilise une loupe pour les réaliser. PR : Ton inspiration porte sur deux thèmes génériques : des natures mortes que tu nommes « les vies silencieuses » et des tableaux avec Pinocchio comme personnage récurrent ? Le périlleux temps des cerises - David DECOBERT (pastel) DD : Oui je préfère le terme anglo-saxon Still life au terme nature morte. PR : Peux-tu m’expliquer la récurrence de tes références dans tes oeuvres : le tableau dans le tableau, la coccinelle, des bouts de scotch, des bougies, une goutte d’eau, des volutes de fumée, des déchirures … ? DD : Oui ce sont des références à des vanités qui sont des allusions au temps qui passe. La bougie, les déchirures sur le papier sont des memento mori (en latin : « souviens-toi que tu vas mourir »). Ils représentent différents éléments symboliques dont l'association évoque le caractère éphémère de la vie et la fragilité des choses matérielles. Le scotch, le tableau dans le tableau sont des clins d’oeil à la peinture trompe-l’oeil. PR : Je trouve que tes oeuvres que tu qualifies de « minimalistes poétiques » ont la qualité d’être immédiatement identifiables ? DD : Ce titre a été trouvé par la journaliste Stéphanie Portal qui a eu la gentillesse de m’autoriser à le réemployer pour mon site internet. Je vais effectivement à l’essentiel : palette de couleurs assez réduite, utilisation d’objets « simples » du quotidien (verres ordinaires, tasses), peu d’éléments exposés et épure de la mise en scène. PR : Le choix des titres de tes réalisations sont-ils poétiques, emprunts de dérision, d’humour, d’ironie et veux-tu nous transmettre des messages ? DD : Ma réponse va être décevante. Je peins plutôt au gré de ma perception du moment présent, de mes envies sans rechercher vraiment un sens, un message. Ce sont les visiteurs qui me confient que mes tableaux leur racontent des histoires, se les approprient et me livrent des interprétations que je n’aurais même pas soupçonnées ou peut-être inconsciemment. Bien souvent, le point de départ de mes créations est une envie d’utiliser une couleur, une harmonie ou une association de couleurs. PR : As-tu une organisation millimétrée de travail ? DD : Au départ c’est une envie qui va guider une idée, une couleur. Puis une fois le tableau commencé, tout est sous contrôle dans la mise en place. En revanche le temps passé n’a pas d’importance, je ne compte pas les heures, à contre-courant de notre société qui veut « que tout soit fini avant de commencer », je prends le temps qu’il faut pour mes réalisations. Ce sont certainement mes Pinocchio qui sont le plus exigeant en temporalité car plus de détails dans le personnage. PR : Ton tableau « Mon Girault 58 » est-il une référence à la marque ? DD : Oui et 58 une référence à la couleur bistre que j’utilise fréquemment. C’est un tableau qui leur était destiné et qui est d’ailleurs exposé dans leur boutique galerie à Montignac-Lascaux. Leurs pastels et ceux de la marque Rembrandt conviennent à ma pratique. Pinocchiaravaggio - David DECOBERT (pastel) PR : Comment es-tu devenu membre de la Société des Pastellistes de France ? DD : Lors d’une rencontre dans un salon de pastels. PR : La notion d’amateur dans ta pratique artistique, comment la définirais-tu ? DD : C’est une question que je ne me pose pas mais j’aurais envie de te répondre : « Je suis un peintre du dimanche qui peint tous les jours ». Peindre et m’exprimer par la créativité sont des besoins vitaux. Être artiste est plus important que la notion d’amateur ou professionnel. J’ai eu quelquefois la sensation durant ma carrière d’avoir une double vie. Mon travail « alimentaire » m’a permis une liberté dans l’expression de ma pratique artistique. PR : Souhaites-tu te poser une question ? DD : Je ne suis pas trop dans les mots. Mes tableaux en disent déjà beaucoup … Mal de cadre - David DECOBERT (pastel) Interview du pastelliste David DECOBERT par Pierre Raffanel pour la revue POST’ART # 229 - juin 2025
- Poussant la porte du musée de La Poste
Rencontre avec Guillaume Goy, directeur du Musée de La Poste, nouvellement nommé à la tête de cette institution le 6 janvier 2025. Interview de Pierre Raffanel pour la revue Post'Art 229 - juin 2025 Guillaume GOY - directeur du musée de La Poste ©2025 photo Patrick Lazic Pierre Raffanel : Vous avez été tout à tour au sein du groupe La Poste, facteur, chargé de clientèle, conseiller financier, conseiller en patrimoine, directeur d’établissement, directeur de territoire puis directeur de marché à la direction du réseau Outre-mer, pourquoi avoir choisi de vous orienter vers ce poste de directeur de musée ? Guillaume Goy : De façon naturelle, c’est une continuité de ma carrière. Ce poste vient compléter mon parcours managérial au sein du groupe La Poste et me permet de retrouver les racines de mon cursus universitaire : DEA en littérature et médiation culturelle, diplôme en muséographie. PR : Ce choix a-t-il dérouté vos collègues postiers ? GG : Ce choix a surpris quelques collègues postiers qui ont une vision teintée d’une certaine forme de nostalgie de ce musée et même une méconnaissance de son existence et de ses actions culturelles. Je suis très content d’en être le directeur car c’est un lieu plein de vie, un espace de libre expression où nous avons une grande responsabilité vis-àvis de l’histoire postale, de l’Adn du groupe La Poste. Nos actions futures vont tenter d’améliorer sa notoriété et la communication des projets à venir. PR : Quelles sont vos motivations à renouer les liens avec les associations postales, les philatélistes, les collectionneurs ? GG : Mes motivations sont multiples. Mon intention première est que ce musée soit attractif, qu’il soit une vitrine du groupe La Poste mais également de nos partenaires : les collectionneurs, les postiers retraités, les artistes inspirés par l’environnement postal et bien sûr tout l’écosystème lié à la philatélie. Dans les années 70, le musée ne s’est-il pas appelé musée de la Philatélie ! En résumé, je souhaite que ce musée ait les portes grandes ouvertes à un public le plus large possible, qu’il soit un espace engagé pour la parité, l’inclusivité et la diversité. PR : Rechercher de nouveaux partenariats pour le musée de La Poste est-il également une perspective envisageable ? GG : Oui bien sûr, il est intéressant de capter de nouveaux partenariats mais, actuellement, nous allons d’abord réinstaller, stabiliser, pérenniser ceux déjà existants depuis plusieurs années et les rendre concrets par le biais d’actions communes. Puis dans un deuxième temps, nous rechercherons des partenaires pour insuffler de la nouveauté. PR : Les territoires français dénombrent quelques 1200 musées de France, 600 musées de société et de très nombreux musées d’entreprise. Le musée de La Poste est-il le seul en France à détenir ces 3 appellations ? GG : A ma connaissance, c’est la seule institution en France à détenir cette triple identité. Le fait d’aborder les expositions par ces trois prismes différents font de ce musée sa singularité et son extrême richesse. Il véhicule l’évolution sociétale, l’histoire et les valeurs de La Poste sur plusieurs siècles au travers de ses collections (plus d’un million de pièces philatéliques, historiques et artistiques). PR : Le musée de La Poste est-il uniquement financé par le Groupe La Poste et bénéficiez-vous d’abattements fiscaux spécifiques liés aux activités culturelles du Musée ? GG : Le musée de La Poste fonctionne exclusivement grâce aux financements du groupe La Poste mais il serait intéressant de mener une réflexion pour ouvrir une possibilité éventuelle au mécénat. PR : Quelles sont les prérogatives de l’appellation « musée de France » et celle-ci vous permet-elle d’être subventionné par le ministère de la culture ? GG : Pas de subvention directe mais une attention particulière du ministère de la Culture. Nous bénéficions d’aides, de formations, d’accompagnements pour des demandes de financements ou des montages de dossier : exemple, la future célébration du Bicentenaire de la photographie sous toutes ses formes et sur l’ensemble du territoire de septembre 2026 à septembre 2027. PR : Le musée de La Poste est structuré en plusieurs directions (patrimoine et expositions, attractivité, service des publics, commerciale, secrétariat général). Ce musée a-t-il un fonctionnement spécifique par rapport aux institutions similaires ? GG : Depuis la création du musée de La Poste, sa structuration a évolué. A une époque, il y a eu une direction du développement. Peu ou prou, son fonctionnement est similaire à d’autres musées. Certains ont une direction de projets éditoriaux, une direction des privatisations et du mécénat… Exposition permanente « Des femmes, des hommes et des métiers » au niveau 3 ©2025 Musée de La Poste- photo Pierre Raffanel PR : Quelle place tient l’art contemporain au sein des collections permanentes de l’histoire postale, de la philatélie française ? GG : Une place importante mais pas plus, pas moins que les collections historiques, que la photographie…L’art contemporain est présent à travers l’art postal et via les projets artistiques de la série artistique philatélique. En 1961, La Poste émet quatre timbres es artistes de renom : Braque, Matisse, Cézanne et La Fresnaye. A partir de 1974, il ne s’agit plus de reproduire sur un timbre une oeuvre existante mais de faire du timbre-poste un support de création artistique : commande est faite à Joan Miró, puis ce seront Agam, Pierre Alechinsky, Jean Dewasne, Alfred Manessier…Une autre dimension de l’art contemporain peut être liée aux propositions d’expositions avec un dialogue de nos collections historiques et des artistes invités tels Laurent Pernot, Olga Kisseleva et ce, avec une juste mesure, car ce musée doit conserver son identité postale, celle de l’histoire de La Poste et de ses valeurs, de son évolution auprès des Français depuis 600 ans, de ses innovations digitales, numériques…L’art contemporain doit venir en regard de cet univers postal, de ce patrimoine philatélique, historique et artistique et ne doit pas être notre orientation principale. PR : Justement, quel type de public fréquente le musée de La Poste ? GG : Le musée de La Poste est un musée populaire, généraliste et nous avons prévu, prochainement une étude de nos publics. Cela nous permettra de réaliser une analyse factuelle de notre visitorat. PR : Ce musée détient-il un fonds d’art contemporain d’artistes postiers ? GG : Essentiellement de l’art posté et de l’art postal. A ma connaissance, nous n’avons que quelques oeuvres d’artistes postiers. Dans les années à venir, mon souhait serait d’avoir une attention particulière à verser dans les collections du musée quelques réalisations qualitatives et respectant les exigences de valorisation patrimoniale. PR : Vous avez à coeur de mettre en valeur les artistes postiers. Un Salon national organisé en partenariat avec la fédération La Société Artistique avait lieu jusqu’en 2013 dans la galerie du Messager (actuellement dénommée galerie des expositions temporaires). Voulez-vous renouveler cette expérience ou avez-vous d’autres projets ? GG : Plusieurs projets importants sont en préparation : un premier en lien avec le monde philatélique et le deuxième serait effectivement d’inviter des artistes postiers de manière le plus large possible à exposer dans certains espaces du musée de La Poste. Je suis convaincu que nous allons faire des découvertes incroyables d’où l’idée d’organiser très prochainement un projet de mise en valeur d’une sélection d’artistes postiers. PR : Parallèlement à votre carrière postale, vous vous êtes impliqué dans la vie locale comme Conseiller municipal, chargé de la culture et du patrimoine à Avon de 2014 à 2020 ? Qu’avez-vous retenu de cette expérience et avez-vous l’intention de la renouve-ler ? GG : Ma priorité est le musée de La Poste et j’y consacre tout mon temps. L’expérience d’élu m’a permis de travailler en connexion avec des associations artistiques, des artistes, d’être commissaire d’expositions. J’ai également eu l’opportunité de créer une association dédiée à la préservation du patrimoine maraîcher. PR : J’ai cru lire que vous avez été également engagé dans d’autres projets culturels ? lesquels ? GG : J’ai été metteur en scène pendant 10 ans d’une troupe de comédies musicales qui organisait des spectacles vivants : au début des reprises (Starmania, Le Roi Soleil, les Misérables…), les trois dernières années, des créations en collaboration : dialogues, compositions musicales, costumes… Nous étions une troupe semiprofessionnelle de 80 personnes, gérée par l’association Musiques et Spectacles en Montois : adolescents et adultes bénévoles, musiciens en live, ingénieurs et techniciens du son, quelques interprètes professionnels et quelque cinq mille spectateurs dans une grande salle des fêtes de Montereau-Fault-Yonne. De mes 25 ans dans le domaine culturel, ce fut une de mes plus belles expériences. PR : Avez-vous l’intention d’organiser des résidences d’artistes in situ, en complément des « Cartes blanches » du musée ? GG : Oui pourquoi pas mais avec une temporalité et des modalités qui restent à définir. Le musée Jean-Jacques Henner en a fait l’expérience et cela a été plutôt probant en termes de visitorat et de notoriété. Vue de l’exposition temporaire « La Fabrique du temps » (Commissaire d’exposition Céline Neveux et conseiller technique Etienne Klein). En premier plan photo à gauche, horloge électrique à 3 cadrans qui se trouvait dans les années 1920 à l’hôtel des Postes du Louvre © 2025 Musée de La Poste - photo Pierre Raffanel PR : Pouvez-vous nous dire quelques mots de l’exposition temporaire en cours « La fabrique du Temps » ? GG : C’est une exposition réussie, inspirante, qualitative. La commissaire Céline Neveux a réalisé un bon équilibre entre la valorisation de nos collections historiques : marcophilie, photographies et le dialogue avec des oeuvres contemporaines. Cette exposition est très appréciée des visiteurs, qui la trouvent esthétique, scientifique, interrogative. PR : Quelle sera le thème de l’exposition temporaire en 2026 ? GG : Elle débutera début avril 2026 et aura pour thème « le vêtement professionnel » comme miroir de nos identités, ce vêtement professionnel qui nous accompagne au quotidien à La Poste et dans les grandes entreprises : Sncf, Ratp, la Gendarmerie…Seront également évoqués les liens du vêtement professionnel avec la mode. Cette exposition permettra de mettre en lumière notre magnifique collection de textiles, l’une des plus quantitative et qualitative, à l’instar du Palais Galliera ou du musée de Bretagne. PR : En 2026 quels évènements sont prévus pour l’anniversaire des 80 ans du Musée ? GG : Surprise ! C’est encore un peu tôt pour dévoiler la programmation. Un travail de co-construction avec les équipes du musée est en cours. Il y aura certainement le 4 juin 2025, jour anniversaire du musée, un évènement spécifique et notre programmation habituelle sera ponctuée en 2026, aux couleurs des 80 ans du musée. Façade du musée de la Poste agrémentée d’une oeuvre du sculpteur Robert Juvin composée de cinq panneaux décoratifs en béton moulé ©2019 Musée de La Poste - photo Thierry Debonnaire Le Musée de La Poste en quelques dates (musée d’entreprise, de société et musée de France) 1946 : ouverture du musée postal, consacré à l'histoire postale et à la philatélie française, à l’Hôtel de Choiseul-Praslin (hôtel particulier du XVIIIe) dans le 6e arrondissement de Paris, propriété de la Caisse Nationale d’Epargne, qui va s’avérer trop petit pour abriter ses collections. 1966 : l’administration postale choisit comme nouveau lieu, le siège de la Compagnie Générale de Radiologie, 34 boulevard de Vaugirard. Cet hôtel est détruit en 1970 et le nouveau musée de La Poste est construit à son emplacement 1973 : installation au 34 boulevard de Vaugirard 75015 Paris dans un bâtiment conçu par l’architecte André Chatelin (Premier Grand Prix de Rome et architecte des PTT - courant emblématique de l’architecture de béton des années 1970 dite « brutaliste »). La façade est agrémentée d’une oeuvre du sculpteur Robert Juvin composée de 5 panneaux décoratifs en béton moulé. 2015 à 2019 : travaux pour une entière restructuration par l’atelier Jung Architectures (Architecte : Frédéric Jung et scénographes : Claudine Dreyfus et Isabelle Devin) et mise en valeur à l’intérieur du bâtiment de la structure alvéolaire des figures géométriques en relief du sculpteur Robert Juvin pour qu’elles soient visibles « en creux » (2700 petits prismes évoquant la surface des timbres-poste gravés en tailledouce comme vue au microscope). 23 novembre 2019 : réouverture et obtention de l’appellation « Musée de France » par le ministère de la Culture. 9 août 2022 : distinction « label Architecture contemporaine remarquable » délivrée par le ministère de la Culture . Interview de Pierre Raffanel pour la revue Post'Art 229
- Street For Kids 9 édition
Street For Kids - Musée en Herbe & ICART À l’occasion de cette 9ème édition de la vente aux enchères STREET FOR KIDS , nous avons particulièrement été heureux de rencontrer lors d’une soirée privée de nombreux artistes à l'hôtel Mona Bismarck au 34 avenue de New York dans le 16e arrondissement, un lieu magique en plein cœur de Paris. L’artiste CHANOIR a réalisé une performance en direct et dédicaces. Dédicace et performance Chanoir - STREET FOR KIDS - Musée en Herbe & ICART L’artiste NASTY a réalisé un print au profit du Musée en herbe et dédicaces. Dédicace Nasty - STREET FOR KIDS - Musée en Herbe & ICART Dans le cadre de leur projet de fin d'année, les étudiants du MBA Spécialisé Marché International de l’Art de l' ’ ICART ont organisé cette 9ème édition de la vente aux enchères caritative d’art urbain et contemporain, au profit du Musée en Herbe et ce, dans les locaux de l’ École Bilingue Chardin . Plus d'une centaine d'œuvres majeures d'art urbain étaient exposées, un « line-up » exceptionnel d’artistes : AKTE ONE - ALBEN - ALBER - ALBERTO RUCE - ALEXÖNE - AMSTED - ANNABELLE TATTU - ARDIF - ARDPG - BANKSY- BASTO - BAULT - BLO - BOM.K - CHANOIR - CLEON PETERSON - CLET - CODEX URBANUS - CORBZE - CREN - CREY132 - DA CRUZ - DACO - DAN WITZ - YSEULT YZ DIGAN - DARK - DOK - DRAN - ELPHEGE - ENSEMBLE RÉEL - EPSYLON - ËRELL - ERIC LACAN - EVAZÉSIR - EVOL - FENX - FRANCK NOTO - FUTURA 2000 - GREGOS - GRIS ONE - GUY DENNING - ICY & SOT -IN THE WOUP - INVADER - JANA & JS - JEAN FAUCHEUR - JEF AÉROSOL - JÉRÉMY VATUTIN - JÉRÔME G. DEMUTH - JÉRÔME MESNAGER & PZK - JÉROME THOMAS - JM ROBERT - JO LITTLE - JOACHIM ROMAIN - JONONE - JORDANE SAGET - KATRE - KOUKA - KRAKEN - LADY M - LA ROUILLE - L’ATLAS - LE CYKLOP - LEK - LEVALET - LUDO - MADAME - MAHN KLOIX - MARK ZWIRNER - MARKO93 - MAXIME DROUET - M.CHAT - MIGUEL CHEVALIER - MISS.TIC - MONSTA - MOSKO - NASTY - NATHANAËL KOFFI - NOTY AROZ - OAKOAK - OLIVIA DE BONA - ONEMIZER - PETITE POISSONE - PHILIPPE HÉRARD - PURE EVIL - QUIK - RERO & ELSA DUAULT - ROUGE HARTLEY - SETH - SHEPARD FAIREY - STEW - SUN7 - TANC - THÉO LOPEZ - THIRSTY BSTRD - TILT - TIM ZDEY - VICTOR VASARELY - VINCENT BARGIS - WXYZ -YAZE - ZEKO
- Fresque d'HOPARE à Argenteuil
©HOPARE - La barque des rêves partagés ©2024 Photo Nicolas Giquel Fresque d'Hopare classée 13e du concours mondial Best of 2024 - Street art Cities Dans le cadre de l’anniversaire des 150 ans de l’impressionnisme initié par le Musée d’Orsay, la ville d’Argenteuil, berceau de l’impressionnisme et le bailleur social Toit et Joie – Poste Habitat a diffusé un appel à projets pour la réalisation d’une œuvre d’art urbain sur le pignon monumental de 317 m2 de la résidence du 98 avenue Maurice Utrillo dans le quartier Val-d’Argent-Sud d’Argenteuil. La ville d’Argenteuil réaffirme ainsi l'importance de la culture pour favoriser la cohésion sociale et l’attractivité du territoire en se donnant comme priorité le développement de l'art sur son territoire. La réalisation de fresques murales constitue ainsi « un Musée à ciel ouvert » en offrant des œuvres accessibles à tous grâce à l’investissement artistique qualitatif de l’espace urbain : plus de 20 fresques de street art, de tailles et d’esthétiques diverses, d’artistes tels que Zloty ( Gérard Zlotykamien) , C215 (Christian Guémy - voir Post’Art n°5), Kan, Hydrane Lo, Sébastien Preschoux, Dark, Jérome Mesnager, Bonus, Corey Pane, Nexer, Seb Toussaint, Hugues de Vendôme, Ecraz, Bears, Junky, Vinnie Graffiti, Edouard Pignon, Blo, collectif Onoff, Hafiz Pakzad, Le Mec Blasé, Michael Barek, Théo Haggai, Wryaeyes, Xare … « Work in progress » de la fresque sur le pignon du 98 avenue Maurice Utrillo (Toit et Joie – Poste Habitat) à Argenteuil ©2024 Photo Nicolas GIQUEL Le groupe Poste Habitat a fait le choix depuis plusieurs années de faire entrer la culture au cœur de son organisation et de son action quotidienne pour développer avec ses locataires des projets artistiques en pied d’immeuble (voir article Post’Art n°227). Cette fresque à l’esprit impressionniste s’inscrit dans le cadre de la charte « 1 immeuble, 1 œuvre ». Cette oeuvre a été conçue en étroite concertation avec les habitants, qui ont partagé leurs récits et leurs rêves lors de rencontres avec l’artiste. Grâce à ce processus participatif, cette création s'imprègne de l’esprit du quartier et des envies des habitants. La barque symbolise l’entraide et la cohésion et la représentation des habitants du quartier Val d'Argent Sud rende cette fresque à la fois personnelle et collective. R eprésentant notre fédération La Société Artistique et le Groupe La Poste, j’ai eu le privilège d’être un des membres du jury de comité de sélection. Plus d’une soixantaine d’artistes et de collectifs d’artistes ont postulé et c’est l’artiste Alexandre Monteiro, alias Hopare, figure de l’art urbain de renommée internationale, qui a été choisi. Plusieurs étapes ont jalonné ce projet participatif en coordination partagée avec Warren et Elliot Buisson d’Urban Signature qui ont contribué à la médiation. Début juillet, plusieurs rencontres ont été organisées en présence de l’artiste et des habitants et des enfants du quartier pour recueillir leurs « impressions » suite à un questionnaire qui leur avait été proposé. Ces différents échanges ont fait émerger des symboles forts, des idées qui représentent véritablement l’esprit du quartier et de son histoire : le savoir-vivre ensemble, Claude Monet et la culture maraîchère. Puis l’artiste a proposé deux maquettes qui ont été soumis aux votes des riverains. Réunion d’échanges avec les habitants du quartier Val d’Argent d’Argenteuil avec HOPARE et Warren Buisson d’ Urban Signature ©2024 photo Pierre Raffanel Hopare nous confie dans l’interview de Michael Tixador pour la ville d’Argenteuil : « J’ai repris la barque et les berges de Monet, qui est un tableau classique de lui, les coquelicots. Ensuite j’ai positionné des personnes du quartier qui étaient en arc de cercle avec un enfant central. Et du coup je pense qu’on a réussi tous ensemble à regrouper toutes les idées que l’on avait eues dans cette fresque, qui est assez colorée. On a repris pour le cadre le bleu de Sèvres, justement en référence au logo de la ville d’Argenteuil. Et le fait que les gens soient dedans avec moi sur la fresque, ça me permettait de moi raconter une histoire, mais eux aussi allaient pouvoir raconter leur histoire. Et je pense aujourd’hui qu’ils sont fiers parce qu’ils peuvent dire « ça c’est mon idée » « là c’est moi qui est représenté ». Je trouve que c’est intéressant quand on vient de réaliser une fresque dans des quartiers populaires comme celui-ci, d’avoir des vraies interactions avec les gens. Parce que du coup, c’est eux qui vont vivre tous les jours avec ; l’intérêt c’est qu’ils soient fiers de leur fresque. Le graffiti ou l’art urbain, on l’appelle comme on a envie ou le street art, ça reste un art populaire et ça doit rester un art qui doit rester accessible à tous. » Inauguration le 14 septembre 2024 de la fresque avec Hopare, Georges Mothron ( maire d’Argenteuil) , Chantal Juglard (adjointe à la culture et au patrimoine) et Melody Tonolli ( directrice de la communication de Poste Habitat-Toit et Joie et adjointe à la mairie de Paris) ©2024 photo Pierre Raffanel Contraction de "Hope", signifiant "espoir" et "art", Hopare a la conviction que la création et l'art peuvent encore changer le monde . Il réalise ainsi sa plus grande fresque pérenne en France. Le 16 mai 2024, formidable coup de projecteur pour cet artiste, une de ses toiles « O Re » (le « roi » en portugais) représentant Pelé, légende du football a été acquise par Kylian Mbappe pour une somme très « rondelette » dans le cadre d’une vente de charité organisée par Artcurial au profit de « PSG For Communities » et de « Naked Heart France » ! Hopare est reconnu pour ses visages aux lignes entrelacées, peint des fresques murales gigantesques dans le monde entier : Los Angeles, Hong Kong, Paris, Tahiti...en partenariat avec l’ONU, l’Alliance française… Si l’envie vous prend de passer par Argenteuil, surtout venez voguer sur la « Barque des rêves partagés ». Alexandre Monteiro HOPARE signant « en bleu de Sèvres » sa fresque ©2024 Photo Nicolas GIQUEL
- Christophe LEGUIADER in situ
Atelier de Christophe Leguiader Post et interview de Pierre Raffanel - Revue Post'Art #228 Pierre Raffanel : Quand as-tu commencé à peindre ? Christophe Leguiader : Jeune, je dessinais à Falaise dans le Calvados. Mes premières influences artistiques furent celles d’ André Dangoisse , mon grand-père photographe, autodidacte, passionné et émérite. Ses centaines de clichés d’après 1945 au cœur du Pays de Falaise lui vaudront même le surnom du « Doisneau du Bocage ». Quelques années après la mort prématurée à 54 ans de mon grand-père, l’historien Emmanuel Le Roy Ladurie fera son éloge; s’ensuivra la numérisation par les Musées de Normandie d’une grande partie de ses tirages photographiques. « Je décide à ce moment-là que d’une manière ou d’une autre, je ferais de l’art, même collectionneur… mais encore plus important était mon attrait pour les arts circassiens : je voulais être clown ». À douze ans, le décès de ma grand-mère m’affecte énormément, je tombe malade. Le médecin de famille venu à mon chevet découvre avec étonnement ma chambre entièrement décorée d’affiches de cirque et me met en contact avec notre pharmacien, ami des Fratellini. Je rencontre un des membres de leur famille et je m’inscris à l’école du cirque située à la halle aux cuirs de la Villette à Pari s . Tous les mercredis et samedis, pendant 2 ans, j’ai suivi des cours avec Annie Fratellini. PR : Cet apprentissage a-t-il eu un impact pour la suite de ton parcours d’artiste ? CL : Primordial car ces cours m’ont appris la discipline. « En matière artistique, on peut faire ce que l’on veut, mais il faut d’abord beaucoup travailler». Essentiel, car mon apprentissage au sein de la famille du cirque m’a transmis le respect du public. « Sans le public, l’artiste n’existe pas ! ». PR : Et après ? CL : Je faisais de l’écriture, j’écrivais des poèmes sans trop savoir ce que j’allais faire…J’ai alors commencé un CAP de pâtissier à Paris, puis suis revenu à Falaise pour passer mon baccalauréat en 1981. Parallèlement je peignais, je réalisais des collages façon Prévert, à la manière surréaliste, comme un amusement. Ensuite, pour remonter à Paris, je passe un concours des PTT pour avoir un emploi alimentaire mais je suis nommé à Évreux en 1983 ! Du coup Je décide de reprendre des études de littérature à l'université de Rouen où je vais faire la rencontre de la médiéviste Françoise Ferrand. Parallèlement je participe à une exposition caritative à la Maison des Arts où je présente des dessins appréciés par les visiteurs. Cette expérience m’amène à la conclusion qu’à cette époque-là, il était plus facile pour un artiste peintre d’exposer, que pour un écrivain de se faire éditer ou pour un musicien de trouver une salle de concert… PR : Quel style de dessins as-tu exposé lors de cette exposition ? CL : C’était ma première période créative : des dessins lavés. Une technique assez simple : « Si je ratais un dessin, je le passais sous la douche. Sur le papier, apparaissait alors quelque chose de nouveau ! ». En même temps, je continue mon travail d’écriture à la faculté, et ma professeur et médiéviste Françoise Ferrand m'invite à effectuer une étude comparative entre les Grands Chants courtois des trouvères et l'architecture des cathédrales gothiques. De fil d'or et d'argent - Christophe Leguiader ( brou de noix, liant acrylique, collage, encre, feuilles d'or et d'argent) PR : Pourquoi, pour qui étaient créées ces chansons d’amour au XIIe siècle ? CL : C’était un art au service des puissants, Princes, Rois ou au service de l’Église. Jusqu’au XIIe siècle, tout se déroulait dans les campagnes, puis les villes ont commencé à prendre de l’importance. Création des premières communes où les artistes de l’époque étaient des moines qui, par la suite sont devenus des clercs. Ces premiers chants courtois deviendront « prétextes » à faire émerger un art profane. Notre-Dame, référence à la Vierge Marie, vocable profondément inscrit dans la tradition de l’Église aura par la suite un second vocable : Notre-Dame de Beauté, patronne de tous les artistes… PR : Les artistes de cette époque ne travaillaient que sur commande ? CL : Effectivement, à cette époque, les artistes sont des artisans – peintres, musiciens – qui réalisent leurs œuvres uniquement sur commande. « C’est une notion très importante pour moi, l’art est avant tout un métier ; l’art est utile. » PR : Justement j’aborde ce thème dans l’édito de ce 228e Post’Art, peux-tu m’en dire plus ? CL : Sans conteste, « l’art est utile » fût mon postulat de base dès mes premières réalisations. Une autre réflexion me taraudait : « Pourquoi quand on rentre dans une église romane cistercienne où il n’y a rien, se dégage une impression de beauté. » Comme cet ouvrage de Pierre Guyotat où il n’y a rien. Je considère que la littérature est primordiale dans mon processus de création. PR : C’est pour cela que ton atelier est rempli de bouquins ? CL : Mon atelier est d’abord une bibliothèque et je trouve fondamentale la pensée cistercienne de Bernard de Fontaine, abbé de Clairvaux : « Je le dis pour les simples, qui ne savent pas distinguer la couleur de la forme : la forme est essentielle à l'être ». Mais la musique est également importante pour moi. J’ai d’ailleurs appris la trompette lors de mon apprentissage en école du cirque. PR : Y-a-t-il eu des moments charnières ? Y-a-t-il eu une évolution dans ton cheminement artistique ? CL : En 1986, j’ai arrêté d’exposer. Je ne trouvais plus de sens, des questionnements sans réponse m’ont poussé à cette pause... Puis les aléas de la vie m’ont amené à Lille en 1991, progressivement je recommence à envisager un cheminement artistique et en 1995 je recommence à exposer : une série à base de brou de noix avec pour la première fois, la capacité à présenter un ensemble cohérent et homogène. Ce fût un succès d’estime, les encouragements de peintres lillois notoires et cela m’a permis de faire une rencontre, certainement, la plus importante de ma vie avec Suzy Maes. Elle possédait deux espaces à Bruxelles : une galerie spécialisée dans le meuble-sculpture et une autre dédiée à la location. Puis elle n’a conservé qu’une seule galerie - avenue Brugmann dans le quartier résidentiel des Sablons - avec quelques artistes dont je faisais partie, avec entre autres Speedy Graphito. Elle me prodiguait moultes conseils avisés, sans être directive et m’encourageait avec bienveillance vers une exigence de qualité. Pendant 15 ans, ce ne furent qu’expériences gratifiantes, constructives et productives. Sans titre (papier) - Christophe Leguiader ( brou de noix, liant acrylique, collage, encre) PR : Et ta rencontre avec notre association La Société Artistique ? CL : En 2002 lors d’une rencontre pendant un salon du peintre Julien Le Strugeon qui était membre adhérent de la Société Artistique depuis les années 50. À l’époque, il n’y avait déjà plus d’atelier : un problème électrique du four avait provoqué un incendie dans le local prêté par France Télécom. Avec un petit groupe d’artistes postiers, nous avons organisé un salon à Wattrelos où Julien prodiguait des cours. Puis en 2011, nous avons organisé en synergie avec la fédération, le Salon libre national à la salle des Célestines, une très belle cave voutée à Lille. Nous participions également aux salons nationaux organisés par la fédération jusqu’en 2013, cela nous permettait d’exposer à Paris avec un droit d’accrochage très peu onéreux. Notre Cercle Amical de Lille a été content de voir que, depuis ton arrivée à la fédération, cet événement fondateur et historique de la Société Artistique ait repris à partir de 2021. PR : Est-ce que le questionnement que tes œuvres provoquent d’emblée sur nous, regardeurs, est un choix, une volonté délibérée de ta part ? CL : C’est un peu délicat de répondre à cette interrogation… Les visiteurs sont souvent ébahis, mais surtout interloqués par les aspects techniques de mes œuvres : ce fameux vernis qui ressemble à de la laque, la petite pièce très brillante et quant à mes réalisations sur papier, c’est l’aspect « brûlé » qui les interpelle. PR : Justement, peux-tu m’expliquer tes techniques ? CL : Dans mon atelier de taille modeste, il me faut de l’eau, les dernières feuilles de rouleaux de sopalin. Au début j’utilisais l’encre de chine, maintenant le brou de noix à l’instar du peintre Pierre Soulages : c’est un matériau organique, végétal que je trouve chaleureux. Souvent la construction de ma toile se fait au brou de noix avec des traits linéaires, sans courbe ; m’inspirant de l’architecture des cathédrales. Ces traits rectilignes prédéterminent un espace bien défini. Charles Baudelaire ne nous dit-il pas : « Je déteste les courbes qui détruisent les lignes » « Je hais le mouvement qui déplace les lignes ». PR : Pourquoi les dernières feuilles de sopalin ? CL : C’est un aspect purement technique qui me permet, grâce à un lavement doux « d’écraser mon premier dessin » et qui est la deuxième phase dans mes réalisations. Ensuite je reconstruis tout un univers qui parle aux gens. PR : Et l’élément brillant souvent que l’on peut observer sur la majorité de tes toiles ? CL : C’est primordial. Souvent on me dit que » je peins des portes » . Effectivement cet élément s’apparente à un trou de serrure, une invitation pour les regardeurs, une incitation à la fascination. J’aime aussi qualifier mes toiles de « tableaux de porte ». Je conseille souvent de les exposer dans un couloir, un endroit de passage afin que la toile ne soit pas regardée de face, mais en passant pour garder une vision. Mais également pour donner une utilité à la toile, celles de rendre ton trajet agréable et de participer à la vie. Sans titre (papier) - Christophe Leguiader ( brou de noix, liant acrylique, collage, encre) PR : Crois-tu à l’inspiration, à ce souffle créateur qui anime l’artiste ? CL : Pas du tout. Il peut y avoir des choses qui marquent, de légères et courtes fulgurances mais je crois surtout à la valeur travail. En revanche, il est très important d’avoir une mise en condition, une sorte de concentration qui peut durer quelques dizaines de minutes, plusieurs heures ou plus si besoin. PR : Te considères-tu comme un autodidacte ? CL : Je n’ai pas pris de cours de peinture au sens littéral du terme. L’essentiel je l’ai appris par des cours en école du cirque : être rigoureux, travailler, s’entraîner. Cela vaut pour tous les arts, le reste n’est que de la technique qui s’apprend…Ce que j’ai toujours recherché et que je trouve formateur, c’est la rencontre avec d’autres artistes, aller à des expositions, passer du temps dans les musées. Lorsque j’étais à Évreux, j’ai eu la chance d’assister chaque mois à des expositions-conférences avec des artistes tels que Hans Hartung et à Lille, j’échange régulièrement avec le groupe des artistes de Roubaix. PR : Le point de départ de tes créations semblent être de la poésie, un écrit ? CL : Oui à 90%. Exemple de ma dernière exposition personnelle ayant pour motif les fleurs où j’ai pris le poème d' Arthur Rimbaud adressé à Théodore de Banville « Ce qu'on dit au poète à propos de fleurs » et celui de Louis Aragon « La Rose et le Réséda ». Le point de départ de mes créations peut parfois être un objet. D’ailleurs, pour mon prochain tableau grand format, je vais me servir du papier de soie qui enveloppe habituellement les mandarines. J’ai également une réalisation en cours d’élaboration dont l’inspiration va émaner du manteau de Roger II de Sicile de couleur rouge qui se trouve à Vienne. PR : Quel rôle joue la peinture actuellement ? L’artiste a-t-il une influence sur le monde qui l’entoure ? CL : L’artiste n’existe que s’il y a quelqu’un qui le regarde. L’artiste ne peut pas exister tout seul. L’art est la conjonction de 3 choses : un créateur, un spectateur et une œuvre. La magie réside dans ce principe-là. L’art est un discours, un dialogue… PR : As-tu déjà collaboré avec d’autres artistes ? CL : Oui en 2002. J’ai vécu une expérience très forte, intense mais difficile également, avec deux jeunes artistes Olivier Radonic et Joel Fouquet. L’idée était de créer des œuvres en groupe, signées par le groupe Appart et non par l’artiste individuellement. Nous avons exposé pendant deux ans. PR : Et l’importance de Mozart ? CL : J’écoute plutôt Bach . En revanche, Mozart est pour moi le premier artiste libre, le premier artiste indépendant, le premier artiste freelance… PR : As-tu des projets ? CL : Personnellement, des participations à des expositions collectives. Actuellement je m’investis énormément dans mon rôle de Président de l’association Reliances d’Artistes avec laquelle j’organise différentes manifestations de peinture dans la chapelle d’Hem - véritable chef-d’œuvre de l’art sacré (tapisserie de Georges Rouault, sculptures d’Eugène Dodeigne, immense mur-vitrail d’Alfred Manessier) - pour les Journées du Patrimoine, les ouvertures d’ateliers d’artistes. Nous collaborons également avec le festival Mos’Art d’Hem dédié aux mosaïques contemporaines. Sans titre - Christophe Leguiader ( brou de noix, liant acrylique, collage, encre) Extrait de la revue Post'Art #228 - décembre 2024
- Rétrospective Albert LAUZERO
« Au vent d’Autan » © Albert LAUZERO 172*202cm (huile sur toile) 1974 Du 29 juin au 13 octobre 2024, sous la houlette de Michel Hue et à l’initiative de la fille du peintre, Pascale Lauzero, une rétrospective intitulée « Entre paysage et musique » a mis en lumière 70 tableaux de 1933 aux années 2000 du peintre Albert LAUZERO à l’ église abbatiale de Flaran . Michel Hue, conservateur départemental du patrimoine et des musées du Gers nous explique lors du vernissage : « Dans le cadre de ses activités autour de l’Art contemporain depuis plus de 23 ans, la Conservation départementale du Patrimoine, des musées du Gers et de l’abbaye de Flaran met en avant chaque été un(e) artiste qui incarne les tendances esthétiques de notre époque. » Pour cette exposition, certainement une des plus importantes rétrospectives de cet artiste, c’est également un retour aux sources ; Albert Lauzero (1909-2006) est en effet natif du Gers, plus exactement de Fleurance. L’ensemble architectural de Flaran est un témoin de l’histoire médiévale gersoise et un joyau de l’art cistercien. Depuis les années 80, il accueille un centre d’art qui abrite l’une des plus belles collections d’art au monde, constituée par le philanthrope anglo-saxon Michael Simonow, tombé amoureux de ce cadre remarquable. En quarante ans, il a constitué une collection de chefs-d’œuvre confiés à l’abbaye. Des peintures du XVIe au XXe siècle (Cézanne, Renoir, Matisse, Picasso, Monet, Braque, Tiepolo, Rubens, Courbet, Rodin …) qui se déploient aujourd’hui magnifiquement dans le dortoir des moines (XVIIIe) qui a fait l’objet d’une importante rénovation en 2008 et 2009. Aujourd’hui, la collection Simonow forte de plus de 300 chefs-d’œuvre, unique en son genre dans le Gers et remarquable à l’échelon national, bénéfice d’un écrin à la mesure de son intérêt historique et esthétique. Certains surnomment l’abbaye de Flaran « le Petit Louvre de la Gascogne » et elle est une étape majeure sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle. Des quatre itinéraires menant de France à Saint-Jacques de Compostelle, la via Podensis part du Puy. Elle traverse le massif d’Aubrac, s’arrête à Conques, Beaulieu, Moissac et passe par Flaran, autant d’étapes dans ce sud-ouest qui voyait se regrouper tous ces « marcheurs de Dieu » en quête de pénitence et d’absolution. « Les grandes orgues » © Albert LAUZERO 147*116cm (huile sur toile) 1972 LAUZERO, une musicalité lumineuse En mars 1974, dans la revue Arts PTT n° 67, Robert Vrinat écrivait : « Notre ami Lauzero et fidèle exposant du Salon des PTT a présenté cet automne un important ensemble de ses œuvres récentes dans les belles et vastes salles de la galerie Durand-Ruel. » Albert Lauzero arrive à Paris en 1927, il a dix-huit ans, dès son arrivée la" lumière" de l'Île de France l'émerveille. Il fait son service militaire à Montpellier et prend conscience de sa vocation d’artiste. Il revient à Paris, tombe malade en 1933, se soignera pendant 5 ans, cessant même de peindre et dessiner. Il reprend sa carrière artistique en 1938, à l’Académie de la Grande Chaumière, sous le professorat d’Othon Friesz, d’Yves Brayer et en tant que graveur dans l’atelier de Paul Bornet. Il est également postier : inspecteur à Montmorency dans l’Oise : à quelle période ? En 1947, sa première exposition particulière Galerie Carmine. Remarqué, il participe au Salon d’Automne, il vit désormais de sa peinture, il multiplie les expositions personnelles ou de groupe et bénéficie de commandes de l’État jusque dans les années 70. Inspiré par les paysages, les bords de Seine et les villages d’Ile-De-France, il se forge très vite un style personnel au sein de l’École de Pontoise (1950) dont il est un des fondateurs avec René Blanc et Charles Pollaci. Il expose abondamment en France et à l’étranger et voyage tout autant. En 1957, il se tourne vers des expérimentations artistiques en atelier, naviguant entre le figuratif et l’abstrait, découvre la baie de Somme et inscrit désormais le thème de la musique dans ses toiles. Il est également membre de la Société Artistique PTT dès juin 1957 grâce au secrétaire général de la Fédération, Gaston Penavayre et à l’entremise de Georges Massié, directeur adjoint des Beaux-arts de la ville de Paris. Dans les années 1970, il retrouve la lumière gasconne et se consacre à une production dense et marquante, affinant son style. En 1983, il devient un des membres fondateurs du groupe « 109 », groupe d’artistes professionnels qui expose en Biennale au Grand Palais. En 1987, Montmorency lui rend un important hommage dans le cadre de son salon et organisera une rétrospective en 2005. « Lever de soleil sur les vignes » © Albert LAUZERO 82*101cm (huile sur toile) 1972 Quand Albert Lauzero est en région parisienne, il est attiré par les molles boucles de la seine, les toits en bâtière des clochers tapis d’Île de France, les coteaux de Montmorency, les falaises du pays cauchois : « Partant d’une palette réduite, il sait par un mûr et patient travail de la brosse faire vibrer des gris et des bleus, d’une multiple et rare distinction, dans des ciels souvent immenses, et sur un dessin nerveux, que rongent de légères épaisseurs de matière, donner du corps à tous les éléments solides, évoquant plus que représentés, avec une infinité d’ocre en des bruns chauds, quelques rouges, quelques émeraudes et de grands blancs crayeux savamment modelés. » Mais il conservera tout au long de sa vie un attachement particulier à sa terre gasconne, à la lumière de son Gers natal où il effectue des séjours réguliers. Ses œuvres sont souvent musicales. Une vibration, une émotion envoûtante, une vision poétique se dégagent de ces toiles où l’on ressent également une volonté affirmée, une nature discrète et délicate. Un dépouillement de construction qui le conduit aux limites de l’abstrait. Sa tendance à structurer les surfaces en formes géométriques, en prismes de lumière, en verticales qui s’élèvent, évoque une certaine spiritualité. Présentation de la rétrospective Albert Lauzero par Michel Hue et en présence de Pascale Lauzero lors du vernissage ©2024 Photo Pierre Raffanel
- Olympiade culturelle "Fête du sport"
Nageuse (aquarelle) François Bonharme Gernez & Réalisation Fabiola Lheureux A l 'occasion des “jeux olympiques et paralympiques” qui ont lieu du 26 juillet au 8 septembre 2024 en France, la fédération de la Société Artistique à l'initiative de Pierre Raffanel a proposé à ses artistes adhérent(e)s une animation dans le cadre de cette olympiade culturelle JO Paris2024. "Rien à gagner, ni à perdre, juste l’envie de s’amuser, de participer et de montrer des créations sur le thème du SPORT " Post de Pierre Raffanel (septembre 2024)
- La culture en pied d’immeubles
Rencontre avec Patricia Guérin, Directrice de la culture du bailleur social Toit et Joie – Poste Habitat. Interview et article de Pierre Raffanel © Patricia Guérin - Directrice de la culture Toit et Joie - Poste habitat Pierre Raffanel : Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots votre rôle de Directrice de la culture au sein du bailleur social Toit et Joie – Poste Habitat (1) ? Patricia Guérin : Mon rôle est d’animer cette direction de la culture et de mener à bien avec mes collègues une trentaine de projets par an que nous réalisons dans nos résidences avec nos habitants. Ces projets au long cours durent de 6 mois à 2 ans et sont réalisés en co-création avec des compagnies artistiques professionnelles et nos locataires. Cette direction de la culture a pour but d’aller au-delà des missions premières du bailleur social qui est de loger les habitants, de les accompagner et de les amener dans un imaginaire, dans une découverte de cultures variées, tout en étant à l’écoute des cultures émanant de chaque habitant. PR : Quelles raisons motivent un bailleur social à mener des actions culturelles ? PG : Cette direction de la culture a trois objectifs. Le premier est le bien-vivre ensemble. Ces actions culturelles sur un temps long favorisent des moments conviviaux et permettent l’organisation d’ateliers. Ces rencontres génèrent du lien entre les résidents, atténuant par anticipation des frictions éventuelles. Ces projets culturels in situ permettent au bailleur d’avoir une présence accrue sur le « terrain », d’améliorer les échanges avec les locataires, d’être plus à l’écoute et de placer les relations humaines au premier plan. Le deuxième est l’accès à la culture par l’expérience, ou plus exactement d’aventures culturelles avec des compagnies artistiques qui vont venir régulièrement dans les résidences, permettant aux locataires de voir l’artiste dans son processus de création, d’être dans les coulisses du processus créatif. Ce qui est unique ; habituellement c’est le public qui se déplace voir des spectacles, dans nos projets ce sont les artistes qui vont vers le public. PR : Un peu à l’image du facteur postier qui vient amener le courrier à domicile… PG : Tout à fait. Ces projets rendent les artistes plus accessibles permettant une proximité à la culture, un partage moins élitiste. Le troisième objectif est de porter un autre regard sur les quartiers populaires. Les médias relaient souvent des informations négatives. Nos projets permettent d’apporter un autre regard plus constructif sur les quartiers. « Le Lion des Genêts » rebaptisé par les jeunes «Chelsea B’Gem » (2020, placage bois sur structure acier) . Cette sculpture monumentale est devenue l’emblème du quartier des Genêts. Cette œuvre collective a été réalisée dans le cadre de la réhabilitation de la résidence Toit et Joie - Poste Habitat à Saint–Michel-sur -Orge avec La Lisière (centre de création pour l’espace public) et deux artistes plasticiens Anton et Teurk. Ce projet s’inscrit dans le cadre du programme 1 Immeuble 1 Œuvre et a été mis à l’honneur fin 2023 dans le hors-série Connaissance des Arts. © Toit et Joie - Poste Habitat PR : Depuis combien de temps ces projets culturels en pied d’immeubles existent-ils et s’agit-il d’une politique culturelle à proprement parler ? PG : Sept ans. Cette direction de la culture a été créée par Michèle Attar, Directrice générale de Poste Habitat. Depuis son départ à la retraite, Sylvie Vandenberghe a pris le relais en continuant à soutenir ces projets culturels pour promouvoir le bailleur en harmonie avec toutes les Directions de Toit et Joie - Poste Habitat. PR : Le budget alloué à votre direction de la culture est-il uniquement corrélé à l’abattement de la taxe foncière sur les propriétés bâties ? PG : Il y a plusieurs sources financières. En premier lieu, les fonds propres de Poste Habitat, puis la TFPB - abattement de la taxe foncière sur les propriétés bâties - qui va financer des projets uniquement en quartiers prioritaires de la politique de la ville. Ensuite ce sont des financements essentiellement du secteur culturel : ministère de la Culture notamment la DRAC île-de-France et pour des projets ponctuels, d’autres financeurs comme le Centre National du Livre, la Fondation de La Poste, le fonds de dotation agnès b…Depuis peu, nous nous orientons également vers des financements dans la construction : Groupe Angevin, Groupe Legendre… PR : Vos actions culturelles sont-elles bien accueillies par les locataires ? PG : Globalement oui, dans la mesure où nous faisons cette démarche avec la complicité des locataires depuis sept ans. Pour assurer le succès de nos projets nous avons établi un mode opératoire constitué de plusieurs étapes : réunions de concertation, lancements de projets pour expliquer notre démarche pour rendre les projets moins abstraits. Ces temps de médiation et de « moments conviviaux » sont indispensables pour obtenir une bonne participation et adhésion des résidents. Réalisation de Cécile Jaillard, La Nature et les jardins (Résidence à Villiers-Le-Bel) © Toit et Joie - Poste Habitat, photo : Patricia Guérin Ministère de la Culture - Le Prix 1 immeuble 1 œuvre 2023 PR : Quel est le rôle des gardiennes, gardiens d’immeubles ? PG : Primordial. Ils sont de véritables ambassadeurs de nos projets et jouent un rôle majeur dans le lien avec les locataires : affichage, aide pour du porte-à-porte, coups de main pour l'organisation des goûters, rôle d’alerteur… Quelquefois ils peuvent être à l’initiative de certains projets. PR : La direction de la culture a-t-elle de réelles interactions avec le comité de direction du bailleur social ? PG : Oui, nous avons une bonne coordination et encore plus s’il y a des opérations de démolition-reconstruction. L’exemple de la résidence de L’Haÿ-les-Roses où nous avons travaillé en étroite collaboration avec la Direction de la maîtrise d’ouvrage de Toit et Joie – Poste Habitat pour la réalisation du livre avec le photographe Patrick Zachmann est assez emblématique. Nous avons également de multiples interactions avec la Direction du patrimoine et de la politique de la ville, le service de la communication ou encore le service RH. De plus la direction de la culture siégeant au Comité de Direction avec les autres directions, cela nous permet d’avoir connaissance de tous les projets en cours. D’autre part un journal interne diffusé à l’ensemble du Groupe et à ses partenaires ainsi qu’une revue envoyée à nos locataires assurent une communication autour de nos différentes actions. PR : Combien de résidences d’artistes sont organisées annuellement ? PG : Environ une trentaine de projets et autant de compagnies artistiques. PR : Plutôt impressionnant quantitativement ? PG : Effectivement. Avant de contractualiser avec les compagnies artistiques, nous redéfinissons en amont le contexte de nos projets de manière à ce que les artistes s’approprient nos missions, qu’ils puissent réaliser du sur-mesure. Il arrive parfois qu’ils réécrivent le projet qu’ils avaient imaginé au départ. PR : Des appels à projets sont-ils systématiquement mis en place ? PG : Un par an, exceptionnellement deux en 2024. Ces appels à projets nous permettent de renouveler nos réseaux d’artistes et de nous faire connaître de manière plus large comme opérateur culturel. Réalisation de Claire Courdavault « Le temps des Andelys » fresque monumentale à l’échelle de la ville et de son architecture accompagnée par l’ association Quartier Monde dans le quartier des Friches, à Maurepas © Toit et Joie - Poste Habitat PR : J’ai eu le privilège au mois de février d’être un des huit membres du jury du dernier appel à projets Poste Habitat « Prendre place » pour une résidence de création partagée dans la ville de Saint-Denis. Les artistes que nous avons choisies ont fait consensus de manière quasi-unanime, est-ce le cas habituellement ? PG : Oui, plutôt. PR : Les résidences d’artistes sont-elles destinées uniquement à des artistes d’arts visuels ? PG : Non, nous abordons toutes les disciplines artistiques : photographie, cinéma, littérature, arts graphiques, BD, théâtre, arts graphiques, musique…en essayant de « tordre le cou » à cette idée reçue qu’il n’y aurait que de l’art urbain en banlieue. PR : Est-ce que ces projets culturels génèrent du lien social entre artistes et locataires ? Peut-on d’une certaine façon le quantifier ? PG : Nous l’appréhendons entre autres par les réactions des gardiens, des résidents qui nous sollicitent suite à un premier projet pour renouveler une autre action l’année suivante. C’est plutôt du ressenti ! Nous avons la volonté avec la Directrice générale Sylvie Vandenberghe de mener une étude plus approfondie avec l’Observatoire des politiques culturelles. Cette étude durera une année et s’effectuera sur un échantillon de nos projets. Elle permettra d’évaluer l’impact de nos actions sur les locataires mais également nos relations avec les acteurs culturels du territoire, les partenaires locaux (médiathèques, villes, maisons de quartier…). Par ailleurs, nous avons été honorés en 2023 du prix 1 immeuble 1 œuvre par l’ex-ministre de la Culture Rima Abdul-Malak, ce qui montre la part d’intérêt et de confiance que ce ministère porte à nos actions. PR : Les artistes étant parfois « égocentrés », sont-ils toutes et tous appétent(e)s à ce genre de propositions culturelles ? PG : Effectivement nos projets vont plutôt se réaliser avec des artistes qui ont le souhait de se confronter à un public éclectique avec un désir de « sortir de leur zone de confort ». Certaines compagnies artistiques cherchent ce type de projets comme matière première pour la création de leurs œuvres : par exemple des artistes travaillant sur l’écriture d’une pièce de théâtre peuvent avoir besoin de confronter leur texte grâce à l’interprétation de jeunes résidents (insertion de termes argotiques ou de témoignages de mémoire pour étayer un sujet…). Les artistes vont ainsi « nourrir leur art » et les résidents vont pouvoir s’initier au processus de création, prendre part à un projet en commun, performer, se sentir fiers de leur participation durant l’élaboration créative et lors de la restitution en public des projets. Pendant la période du Covid, les artistes ont été privés de leur public. Beaucoup ont eu à cœur désormais d’aller vers le public et de sortir des lieux culturels traditionnels. De plus, les professionnels de la culture ont pris conscience que dans les grandes institutions, au théâtre par exemple, c’est souvent les mêmes personnes qui se déplacent et du coup, nos actions leur permettent de s’ouvrir à de nouveaux publics. PR : Comment s’organisent les résidences d’artistes ? Ont-elles un protocole prédéfini en amont et une récurrence dans leur déroulement ? PG : Les artistes établissent le format, le calendrier de leurs interventions dans la résidence et de notre côté, nous leur signifions qu’une récurrence de leur présence est primordiale au bon déroulement de nos projets. Des étapes essentielles et identiques pour chaque action menée : présentation, lancement, développement et restitution avec des points d’orgue durant le projet. PR : L’ancrage territorial du bailleur social Poste Habitat se concentre essentiellement sur l’île-de-France, est-ce que des projets artistiques sont en cours dans les résidences en Normandie, Rhône-Alpes et Provence ? PG : Nos activités sont effectivement concentrées sur l’île-de-France et nos résidences en Normandie, Rhône-Alpes et Provence sont assez récentes, une quinzaine d’années. Depuis 2023, nous portons un nouveau projet pour chaque région et cette année, nous allons intégrer ces projets dans notre festival « Au-delà des toits ». PR : Actuellement les institutions culturelles ont-elles une réelle volonté à chercher de nouvelles manières d’attirer de nouveaux publics ? PG : Oui, c’est réellement tangible. Nous le voyons au travers de nos récentes et nouvelles collaborations : INRAP, centre Pompidou (dispositif 1 jour 1 œuvre), musée de La Poste, Scène nationale de l’Essonne, pourparlers avec le musée du Louvre, le Palais de Tokyo ou encore Chaillot… PR : Peut-on considérer que ces actions culturelles permettent d’avoir un accès à la culture moins consumériste ? PG : Oui sans conteste. J’ai pour exemple un projet d’une série dont un épisode a été réalisé dans la ville des Ulis avec La Compagnie L’œil du Baobab qui a permis à une locataire retraitée de se découvrir une vocation d’actrice ; elle a été récemment recrutée comme figurante dans une série à gros budget tournée à La Défense. PR : Votre parcours professionnel est et a été résolument lié au secteur culturel (École du Louvre, DEA d’histoire contemporaine sur les relations entre la télévision et l’art, centre d’archives « musiques électro-acoustiques » de Pierre Schaeffer, maison d’édition Images modernes fondée par Bernard Picasso, Alliance Française à Toronto, comité d’entreprise de la Ratp), si vous deviez ne retenir qu’une de vos expériences, laquelle choisiriez-vous ? PG : Peut-être une expérience qui fait le lien avec tout mon parcours culturel, ma rencontre avec François Morel. Lorsque j’étais Directrice de la culture de l’Alliance Française à Toronto, je l’ai invité pour une présentation de son parcours d’acteur et pour l’enregistrement d’un billet France Inter à Radio-Canada. À mon retour en France, j’étais alors responsable du centre culturel de la Ratp, François m’a sollicitée pour une recherche d’orchestre qui pourrait l’accompagner pour sa dernière date de tournée de chant à l’Olympia. Je lui ai proposé l’orchestre des agents de la Ratp et ce fût un magnifique moment de partages artistiques. Ce même orchestre de la Ratp a joué avec l’orchestre du Club Musical de La Poste pour la première date du festival Au-delà des toits en 2022 dans notre résidence de Bagneux : la boucle était bouclée ! PR : Comment est né le festival des arts visuels « Au-delà des toits » ? PG : Dès la création de cette Direction de la culture. Ce festival met en valeur les projets grâce à ces restitutions et permet aux locataires de performer. PR : Quand aura lieu le prochain festival ? Sa programmation nous réserve-t-elle des surprises ? Sera-t-il parrainé ? PG : En 2023, le festival « Au-delà des toits » a duré 1 mois et proposait 16 manifestations. Cette année, le festival 2024 se déroulera sur une période plus longue : du 15 mai au 29 juin avec 22 manifestations dont 3 en régions. Deux partenariats importants ont été établis pour ajouter un concert à chaque manifestation : concerts classiques avec le festival OuVERTures et musiques actuelles avec les Musiciens du Métro de la Ratp. Pour la première fois, le festival aura un parrain : Jack Lang. Nous sommes très heureux et honorés de ce parrainage ! Festival 2024 « Au-delà des toits » © Toit et Joie - Poste Habitat Retrouvez l'interview de Jack Lang, Président de l’Institut du Monde Arabe, ancien ministre de la Culture et parrain du 7e festival Au-delà des toits. (1) Toit et Joie - Poste Habitat a été créée en 1957 à l’initiative d’Eugène Thomas, secrétaire d’état aux PTT, pour fournir de nouvelles possibilités d’habitation aux personnels des Postes et de Télécommunications qui ne bénéficiaient pas, à l’époque des contributions patronales du logement. Aujourd’hui, au sein du groupe La Poste, la SA Hlm Toit et Joie perpétue les valeurs qui ont présidé à sa création. Les missions de Poste Habitat poursuivent un objectif inchangé, à savoir loger prioritairement les postiers. Cependant, Poste Habitat n’a de cesse de se réinventer pour approfondir sa vocation initiale. C’est ainsi que le groupe a repensé son territoire d’intervention, originellement réservé à l’Ile-de-France (Toit et Joie –Poste Habitat – 15.000 logements annuels) et désormais étendu à la région Rhône-Alpes (800 logements), à la Provence (800 logements) et à la Normandie (600 logements). Article de Pierre Raffanel Extrait de la revue Post'Art 227 (mai 2024)
- 150 ans d’impressionnisme
L’impressionnant hommage national à l’impressionnisme Anna Boch (1848-1936) Cueillette (1890) Huile sur toile 74 x 107 cm Collection particulière © Vincent Everarts Paris 1874, première exposition impressionniste. Monet, Renoir, Degas, Morisot, Pissarro, Sisley, Boudin, Bracquemond ou encore Cézanne ont la volonté en ce jour du 15 avril 1874 de s’affranchir des règles officielles et d’organiser leur propre exposition, sise 35 boulevard des Capucines. 150 ans déjà. Une occasion unique pour le Musée d’Orsay qui abrite la plus vaste collection au monde d’œuvres impressionnistes, de célébrer cette date anniversaire, considérée comme le point de départ d’une nouvelle vision artistique, le coup d’envoi d’un mouvement de rupture de la place de l’art dans son époque. À l’initiative de Christophe Leribault, cet hommage va être célébrer bien au-delà des cimaises parisiennes ; 178 chefs-d’œuvre du mouvement quitteront les quais de l’ancienne gare d’Orsay pour des musées aux 4 coins du territoire français. La grande exposition « Paris 1874. Inventer l’ impressionnisme » a lieu à Paris du 26 mars au 14 juillet 2024 sous le commissariat de Sylvie Patry et Anne Robbins du Musée d’Orsay et, du 8 septembre 2024 au 20 janvier 2025 à Washington sous le commissariat de Mary Morton et Kimberly Jones du National Gallery of Art. Elle propose de retracer l’avènement d’un mouvement artistique surgi dans un monde en pleine mutation, celui d’un après-guerre, faisant suite à deux conflits : la Guerre franco-allemande de 1870, puis une violente guerre civile. Dans ce contexte de crise, ces 31 jeunes artistes - parmi lesquels sept sont aujourd’hui renommés internationalement – se rassemblent sous forme de société anonyme coopérative pour exposer leur travail dans l’ancien atelier du photographe Nadar en une présentation qui n’a rien d’homogène : scènes de la vie moderne, des paysages croqués en plein-air, des tableaux plus conventionnels, de même que des sculptures, gravures et émaux. Comme le note un observateur de l’époque, « ce qu’ils semblent rechercher avant tout, c’est l’impression ». « Un soir avec les impressionnistes, Paris 1874 » Exposition 3D ©Excurio - Gédéon Experiences ©musée d'Orsay Grâce une « expédition immersive » en réalité virtuelle de 45 minutes, nous pouvons nous plonger dans les conditions de visite du XIXe siècle de cette mythique exposition : lueurs blafardes de l’éclairage au gaz, ambiance sonore avec les artistes, les commentaires des invités et les moqueries des critiques lors du vernissage : un voyage véritable dans le temps, fondé sur de minutieuses recherches réalisées durant 2 ans par Excurio, Gédéon Expériences. Au fil de cette déambulation, des échappées vous emmèneront plus loin, sur les lieux qui ont marqué les débuts du mouvement et inspiré les tableaux que vous avez sous les yeux. Vous explorerez ainsi les salles du Salon ; l’atelier du peintre Frédéric Bazille ; la très animée île de la Grenouillère au bord de la Seine, avec Monet et Renoir peignant côte à côte ; ou encore la chambre d’hôtel de Monet au Havre, où celui-ci travaille à son célèbre tableau Impression, Soleil Levant. De Paris à la Normandie, vous participez ainsi à un véritable voyage sur les sites de l’impressionnisme naissant, en une extraordinaire plongée au cœur de la création. Dans « Paris 1874 », une confrontation d’œuvres ayant figuré à l’exposition impressionniste de 1874 et de tableaux et sculptures montrés au même moment au Salon officiel permet de restituer le choc visuel des œuvres des impressionnistes, mais aussi de le nuancer, par des parallèles et recoupements inattendus entre la première exposition impressionniste et le Salon. Cette exposition du musée d’Orsay montre les contradictions et l’infinie richesse de la création contemporaine tout en soulignant la modernité radicale de l’art de ces jeunes artistes. « Bonne chance !», les encourage un critique, « il ressort toujours quelque chose des innovations. » Cette exposition est une nouvelle occasion de voir ou revoir La danseuse de Degas, le Bal masqué à l’opéra de Manet prêté par Washington, La loge de Renoir venue de Courtauld de Londres, Le boulevard des capucines de Monet conservé à Kansas City…mais également des artistes plus conservateurs avec Gérôme, Alma-Tadema, Ferdinand Humbert, Gervex, Detaille, Albert Maignan…Malgré un succès de scandale et malgré le soutien de quelques collectionneurs De Bellio, Choquet, Hoschedé, Caillebotte, et du critique Théodore Duret, l’exposition de 1874 fut un échec. L’exposition présentera des prêts exceptionnels, notamment Impression, soleil levant de Claude Monet, dont le titre inspire le terme d’« impressionniste » – une moquerie de journaliste qui finira pourtant par donner son nom à ce mouvement artistique et sceller son succès. Deux expositions parallèles Il est à noter qu’en cette année 1874, à quelques semaines d’écart, deux expositions vont avoir lieu à Paris, la Première exposition des artistes indépendants dans l’ancien atelier de Nadar et le Salon officiel au Palais de l’industrie. Près de 300000 visiteurs se pressent sur les Champs-élysées contre 3500 boulevard des Capucines ! On a laissé entendre que les peintres académiques exposaient au Salon officiel tandis que la future avant-garde impressionniste participait, seule, chez Nadar. Or, il n’en est rien. Douze artistes expositions simultanément leurs œuvres dans les deux lieux, certainement pour avoir une meilleure chance de trouver un public d’acheteurs. Berthe Morisot (1841 -1895) Vue du petit port de Lorient 1869 -Huile sur toile 43,5 x 73 cm Washington, The National Gallery of Art, Ailsa Mellon Bruce Collection, 1970.17.48 ©Image Courtesy of the National Gallery of Art, Washington 178 œuvres prêtées, 34 institutions participantes, 13 régions représentées. La lumière des impressionnistes a su capter tout à la fois la métamorphose des jours et les mutations du siècle. Une lumière qui portait si loin qu’elle augurait de toutes les modernités à venir, de l’expressionnisme à l’abstraction. 150 ans après, il convenait que l’écho de cet événement inaugural résonne sur tout le territoire. Le prêt de nombreuses œuvres sur tout l’hexagone se justifie par le fait que l’impressionnisme n’est pas né uniquement à Paris. Les artistes ont travaillé à la campagne, au bord de la mer, en Normandie, dans le sud de la France…La plupart des œuvres prêtées iront en Normandie (Caen, Giverny, Rouen) pour le festival Normandie Impressionnisme, mais c’est le Musée Ingres-Bourdelle à Montauban qui a ouvert le bal de ce tour de France, avec une exposition qui a débuté le 19 janvier avec deux œuvres de Gustave Caillebotte : le Parterre de Marguerites prêté par le musée des impressionnismes Giverny et Les Soleils, jardin du Petit Gennevilliers, peinte en 1885 et faisant partie des collections du musée d’Orsay. Et si nous continuons ce tour de France de cet anniversaire des 150 ans de l’impressionnisme... Amiens Ne possédant aucune œuvre impressionniste, le Musée de Picardie a sollicité le prêt du tableau Sur la plage d’Edouard Manet, peint en 1873 à Berck-sur-Mer. C’est en effet par l’angle territorial que le musée souhaite aborder la peinture impressionniste, en montrant une plage bien connue des Amiénois. La présentation du tableau sera l’occasion de montrer au public les aspects qui caractérisent l’art de Manet : liberté dans l’imitation du motif, fluidité de la touche, exécution en plein air, abandon des règles de la perspective, intimité du sujet. Bordeaux Le regard fatal de Berthe Morisot dans Le Balcon de Manet (1832-1883) et La Cabane des douaniers de Claude Monet (1840-1926) surplombera les quais bordelais de la Garonne au MusBA. La présentation de ces deux invités de marque est l’occasion de mettre en lumière les collections du musée, qui vont du pré-impressionnisme au post-impressionnisme avec Jean-Baptiste Corot et l’École de Barbizon, Eugène Boudin et son Port de Bordeaux, Auguste Renoir, Mary Cassatt et les Bordelais Louis-Auguste Auguin et Alfred Smith. Une riche programmation culturelle accompagnera l’événement… Douai Les drapeaux de La Rue Montorgueil flotteront à Douai. Le prêt de ce chef-d’œuvre de Claude Monet, qui constitue une des sources visuelles de l’art de Henri Duhem, est un évènement qui permet d’évoquer l’arrivée de la modernité dans le Nord et la personnalité attachante de cet artiste, collectionneur et mécène. Avocat de formation, puis élève de Henri Harpignies et d’Émile Breton, Henri Duhem peint toute sa vie des paysages des Flandres, du Maroc, du Boulonnais, de Paris, de Suisse ou de la Côte d’Azur – où il finit ses jours – à l’huile, comme à l’aquarelle. À la tête d’une confortable fortune familiale, il constitue une importante collection autour de Monet, Pissarro, Renoir, Corot, Carrière, Rodin, Meunier ou Claus. Il publie plusieurs articles et essais sur ces artistes, avec lesquels il correspond. Il soutient par de nombreux achats et des commandes le début de carrière de ses amis Henri Le Sidaner et Henri Martin et fut en quelque sorte le « Caillebotte » des post-impressionnistes. Actif pendant 40 ans au musée de Douai, il y fait entrer des œuvres de presque tous ces artistes. Il eut enfin une activité inédite de marchand d’art. Lille Le Palais des Beaux-Arts de Lille possède deux toiles de Claude Monet représentant le village de Vétheuil, issues toutes deux de la donation Masson datant des années 1970 : La Débâcle, peinte dans les premières semaines de 1880 et Vétheuil, le matin, réalisée vingt ans plus tard. Vétheuil occupe une place singulière dans la vie et l’œuvre de l’artiste. En rapprochant les œuvres du Palais des Beaux-Arts de Lille de quatre prêts prestigieux du musée d’Orsay sur le même sujet, tous signés Claude Monet (Les Glaçons, 1880 ; Église de Vétheuil, 1879 ; La Seine à Vétheuil, effet de soleil après la pluie, 1879 ; Vétheuil, soleil couchant, vers 1900), cette exposition permettra d’évoquer à la fois le rythme des saisons et deux périodes stylistiques de l’artiste. Limoges Cité natale du peintre Pierre-Auguste Renoir, la Ville de Limoges s’associe à l’événement avec le musée d’Orsay par le prêt exceptionnel d’une toile du peintre, Portrait de Fernand Halphen enfant, 1880. Le tableau vient rejoindre les cinq toiles de Renoir déjà exposées au Musée des Beaux-Arts. Pour l’occasion, une nouvelle salle est aménagée dans le parcours permanent, entièrement consacrée aux collections impressionnistes du musée (Armand Guillaumin, Joaquin Sorolla), dont les œuvres de Renoir forment le point central, organisées autour du portrait prêté par le musée d’Orsay. Aux côtés du Portrait de Jean (1899) du même peintre ou des Enfants de Gabriel Thomas (1894) de Berthe Morisot, le prêt d’Orsay vient conforter la spécificité d’un fonds tourné vers la représentation de l’enfance. Enfin, la toile est choisie pour être l’« œuvre doudou » du musée, ambassadrice auprès des crèches. Montpellier À Montpellier, le musée Fabre accueillera deux chefs-d’œuvre d’Édouard Manet : Le Fifre (1866) et le Portrait d’Émile Zola (1868). Les collections du musée Fabre pour cette période ont pour cœur les œuvres de Frédéric Bazille, artiste montpelliérain mort trop jeune, en 1870, pour figurer à l’exposition de 1874. Celui-ci fut néanmoins partie prenante des débuts de l’impressionnisme, entretenant une relation tant amicale que d’émulation artistique avec Alfred Sisley, Auguste Renoir, et Claude Monet. Les prêts exceptionnels du musée d’Orsay seront l’occasion d’évoquer les prémices de l’impressionnisme, et notamment la filiation de Gustave Courbet à Frédéric Bazille, deux artistes majeures des collections montpelliéraines, en mettant l’accent sur la figure centrale d’Edouard Manet. Ces deux toiles prendront place dans une salle dédiée du parcours permanent qui mettra en valeur les liens des trois artistes, ainsi que les figures critiques, littéraires et politiques, qui les ont accompagnés et ont défendu la Nouvelle Peinture. Le portait d’Émile Zola par Manet sera ainsi mis en dialogue avec le Portrait de Charles Baudelaire par Courbet ainsi que celui d’Antonin Proust par Manet, homme politique et fervent défenseur des arts, organisateur d’une des premières expositions officielles de Courbet à l’école des beaux-arts de Paris en 1882. Nantes Le trésor national Partie de bateau de Gustave Caillebotte sera présenté dans la salle « Plein air, pleine mer » du musée d’arts de Nantes. Cette salle propose un accrochage resserré sur la peinture de paysages « aquatiques » autour de l’impressionnisme, d’Eugène Boudin à Paul Signac. Les œuvres de Claude Monet, Les Nymphéas à Giverny (1917) et Gondole à Venise (1907) et celles de Johan Barthold Jongkind, Maxime Maufra, Alfred Sisley mettent en avant la manière dont la lumière se reflète sur l’eau, se diffracte dans l’air ou fait vibrer, l’espace d’un instant, l’écume blanche des vagues de Bretagne, de la côte normande ou de la Méditerranée. Pont-Aven Le Musée de Pont-Aven, en partenariat avec le Mu.ZEE d’Ostende (Belgique) rend hommage à Anna Boch (Saint-Vaast, Belgique, 1848- Ixelles, Belgique, 1936), 175 ans après sa naissance. L’exposition dresse le portrait multiple d’une artiste, mélomane, collectionneuse, mécène, voyageuse et passionnée d’architecture à la personnalité dynamique et avide de découvertes. Seule femme à avoir adhéré aux cercles artistiques Les XX (fondé en 1884, 10 ans après la première exposition impressionniste) et La Libre Esthétique, animés par son cousin Octave Maus, elle s’y est positionnée – fait rare pour l’époque – d’égale à égale avec ses confrères. Ensemble, ils se lancent dans l’aventure du néo-impressionnisme, alors incarné par Théo van Rysselberghe, Paul Signac et Georges Seurat. Dans le cadre des « 150 ans de l’impressionnisme avec le musée d’Orsay (1874-2024) », le Musée de Pont-Aven bénéficie du prêt exceptionnel d’un tableau de Van Gogh : Le Portrait d’Eugène Boch, frère d’Anna. Van Gogh fait la connaissance du peintre belge Eugène Boch (1855-1941) vers la mi-juin 1888, alors que ce dernier séjourne pour quelques semaines dans une commune toute proche d’Arles. Le 11 août, une idée a germé dans son esprit, celle de réaliser le portrait d’un ami artiste sur un fond bleu étoilé. Deux semaines plus tard, Boch pose pour Van Gogh. Bien qu’il ne la considère que comme une «esquisse», Van Gogh encadre cette œuvre qu’il nomme Le Poète. Roubaix La Piscine de Roubaix a émis l’idée de demander à sa « Joconde », La Petite Châtelaine de Camille Claudel, de convier quelques enfants impressionnistes des collections nationales. Trois tableaux, de Degas, Renoir et Pissarro, et deux sculptures de Degas seront les invités de marque du marbre élaboré par Claudel dans l’esprit de l’impressionnisme, au début des années 1890. La confrontation de La Petite Châtelaine avec l’étrange Garçon au chat de Renoir et l’ambiguë, iconique Petite danseuse de 14 ans de Degas fera résonner trois visions modernes et iconoclastes de l’enfance. Normandie : Bayeux, Caen, Giverny, Honfleur, Le Havre, Rouen, Saint-Lô et Yvetot. À Bayeux, le musée d’Art et d’Histoire Baron Gérard a pu bénéficier du prêt exceptionnel du musée d’Orsay de Port-en-Bessin, avant-port, marée haute, seule œuvre de la série conservée dans une institution publique française, offre au territoire local un accès privilégié à l’histoire de l’impressionnisme et de son évolution par la présentation inédite d’un paysage réalisé in situ. En Normandie, le Bessin et son littoral ont été une source d’inspiration pour les maîtres du néo-impressionnisme. Au cours de l’été 1888, Georges Seurat a fait de Port-en-Bessin son sujet d’étude, donnant lieu à la réalisation de huit toiles. Caen Le musée des Beaux-Arts de Caen présente une exposition consacrée aux représentations de la ville marchande de 1860 à 1914, organisée dans le cadre conjoint des « 150 ans de l’impressionnisme avec le musée d’Orsay » et du festival Normandie Impressionniste 2024. Constitué d’une vingtaine d’œuvres, le prêt exceptionnel consenti par le musée d’Orsay permet d’éclairer ces décennies marquées par un essor économique sans précédent. Les lieux de commerce se multiplient. Formes anciennes et nouvelles coexistent : l’apparition des grands magasins n’entraîne pas la disparition des boutiques traditionnelles et des échoppes, à l’exemple des étals de bouquinistes représentés par James Wilson Morrice. Les artistes s’attardent sur le mouvement des rues. Sensibles à la présence des commerçants ambulants, aux gestes des modistes, aux attitudes des garçons de café, ils relèvent encore les lettres des enseignes, des publicités et des affiches qui font de la ville un petit théâtre de la marchandise. La programmation culturelle pensée autour de l’exposition met l’accent sur les résonances contemporaines de son propos. Giverny Le projet du musée des impressionnismes Giverny souhaite donner une vision un peu décalée du thème « l’impressionnisme et la mer » en abordant la période de 1870 à 1900. L’exposition se déclinera ainsi en thématiques structurantes : les ports, mais aussi la Normandie et la Bretagne, le traitement de lumière et de la nuit, les tempêtes et les naufrages, la vie en villégiature, le goût du voyage illustreront le parcours et montreront aussi l’originalité des points de vue, le cadrage photographique ou le mode de vie des estivants à l’époque. L’ensemble des 16 prêts exceptionnels consentis par le musée d’Orsay rassembleront des peintures de Johan Barthold Jongkind, Eugène Boudin, Félix Cals, Claude Monet, Édouard Manet, Auguste Renoir, mais, aussi Philip Steer ou Charles Laval. Des œuvres méconnues dialogueront avec des peintures célèbres, créant ainsi un dialogue fécond entre peintures, dessins, estampes, mais aussi photographies et documents d’époque. Le goût des impressionnistes pour les scènes de plage, les vues maritimes ou les portraits des estivants est bien connu et toujours populaire auprès du grand public. Le mouvement impressionniste n’est pas homogène et le traitement du sujet de la marine et du bord de mer diffère selon les tempéraments, mais aussi les préoccupations propres à chaque artiste. Quoi de commun entre Monet et Renoir sur la mer ? De même Pissarro ne voit pas le Havre comme Monet. Le périmètre géographique est assez restreint : les séjours des artistes se concentrent entre la Normandie et la Bretagne. Honfleur L’exposition En compagnie d’Eugène Boudin (1824 -1898) célébre le bicentenaire de la naissance du peintre à Honfleur et le 150e anniversaire de la première exposition impressionniste. Entre Côte de Grâce et Côte Fleurie, à l’aube de l’impressionnisme proposée par le musée Eugène Boudin est centrée sur la figure du peintre et ses amitiés artistiques. Située avant l’éclosion du mouvement impressionniste, l’exposition met en relief la place du littoral normand où Isabey, Courbet, Jongkind ou encore Monet se rendent afin d’explorer, par la palette et le motif, les ciels et paysages situés autour de Honfleur dans les années 1860 et le début des années 1870. Outre le rôle de la Ferme Saint-Siméon comme lieu de rencontre et d’émulation artistique, ou l’année 1865, année phare de fréquentation par des artistes de renom du littoral normand, une attention particulière est portée sur la relation unissant Monet à ses deux mentors. Eugène Boudin, qui l’initie à la pratique en plein air, et Jongkind qui l’aide à parachever son traitement du paysage. Le prêt exceptionnel par le musée d’Orsay de la toile de Monet, La Charrette. Route sous la neige à Honfleur de 1867 ainsi qu’une sélection de toiles d’Eugène Boudin et de Jongkind permettent cette mise en regard singulière. Le Havre L’exposition du MuMa du Havre permettra de confronter des chefs-d’œuvre de la peinture, notamment impressionniste, et de la photographie et de présenter aussi des œuvres rares ou méconnues. Les toiles prêtées par le musée d’Orsay, Cathédrale de Rouen, Train dans la campagne, de Claude Monet, Port de Rouen, Saint-Sever de Camille Pissarro, ou encore la photographie d’ Edmond Bacot Partie supérieure de la façade de la Cathédrale de Rouen, viennent à l’appui des thématiques de l’exposition : le renouvellement de la représentation du paysage et de la modernité que peintres et photographes ont, à leur manière, contribué à forger. Rouen Le musée des Beaux-Arts de Rouen choisit d’élargir la focale et de faire un pas de côté en abordant la figure de Whistler et la fascination profonde et durable que celui-ci exerce entre 1874 et 1914 en France et, plus globalement, en Europe et aux États-Unis. Rassemblant plus de 180 œuvres, cette exposition donne à voir, pour la première fois, l’influence capitale de l’esthétique, de la sensibilité de Whistler sur ses contemporains. À travers le prêt de 24 œuvres (14 peintures et 10 photographies), le soutien du musée d’Orsay à ce projet est exceptionnel. Pièce majeure des collections nationales, l’œuvre la plus illustre de Whistler Arrangement en gris et noir n°1, ou la mère de l'artiste (1871) renouvelle les codes traditionnels du portrait. Le jeu de lignes verticales de la composition renforce l’aspect hiératique de la pose. En rupture avec l’idée qu’une œuvre se doit de raconter une histoire, Whistler affuble ses peintures de sous-titres musicaux, privilégiant l’harmonie colorée à consonance musicale, plutôt que le sujet de la toile. L’impact de cette peinture est immense. Nombreux sont les artistes – qu’ils soient peintres, photographes, écrivains, poètes ou compositeurs, et plus récemment cinéastes – influencés par la singularité de sa peinture, tout autant que par la personnalité hors du commun du dandy américain. Les œuvres des photographes Alfred Stieglitz et Paul Haviland, ainsi que des peintres Charles Cottet, John White Alexander et Fernand Khnopff prêtées par le musée d’Orsay illustrent parfaitement les multiples postérités de Whistler. Whistler James Abbott Mac Neil (1804-1881) Arrangement en gris et noir n° 1, ou la mère de l'artiste (1871) Paris, musée d'Orsay © RMN-Grand Palais (musée d'Orsay) / Jean Schormans Saint-Lô Le prêt de la peinture de Degas représentant les graveurs Desboutin et Lepic s’inscrit dans le projet d’exposition intitulée Degas, Manet, Pissarro, impression(s) de gravures qui se déroule au musée d’art et d’histoire de Saint-Lô du 15 juin au 15 septembre 2024. Le musée met en lumière une technique pratiquée par les artistes impressionnistes mais longtemps restée confidentielle : la gravure. Celle-ci témoigne des recherches sur la lumière, de l’intérêt que les artistes portent aux nouvelles techniques graphiques. Elle permet une histoire révisée de l’impressionnisme qui ne se cantonne pas seulement aux peintres présents aux huit expositions. L’œuvre du musée d’Orsay est intéressante à plus d’un titre car elle permet d’aborder le caractère expérimental de cette technique. C’est en effet sous la direction de Lepic que Degas s’initie au monotype. Lepic est aussi à l’origine d’un procédé, l’eau forte mobile, lui permettant de retranscrire les variations atmosphériques. De plus, cette œuvre témoigne des liens étroits entre les artistes. Ils se représentaient mutuellement dans leurs œuvres et se réunissaient aussi pour encrer ensemble et imprimer des planches chez l’éditeur Cadart. Yvetot Le Musée des Ivoires, situé à Yvetot, accueille un prêt exceptionnel du musée d’Orsay : Les Villottes de Charles Angrand. Le musée municipal présentera cette œuvre en lien avec l’exposition de Marc Desgrandchamps qui se déroulera simultanément à la galerie Duchamp, centre d’art contemporain d’intérêt national. Les 150 ans de l’impressionnisme sont l’occasion pour la Ville d’Yvetot, son musée municipal et son centre d’art contemporain d’intérêt national, de considérer le Pays de Caux – ses paysages, ses spécificités, sa lumière – comme un motif à part entière. Un territoire que les peintres, et notamment les impressionnistes et les artistes proches du mouvement, ont su saisir. Car il est bien question de saisissement : à l’image de ce tableau de Charles Angrand, Les Villottes. Artiste rouennais, qui a arpenté ce territoire et dont les préoccupations picturales, vers 1887 au moment de la réalisation de cette huile sur carton, ne sont pas – encore – éloignées des recherches de ses amis Impressionnistes, et en premier lieu de celles de Claude Monet. Manière ainsi de créer un aller-retour entre deux peintres, entre deux regards qui interrogent à 150 ans de distance, ces mêmes paysages. Extrait de la revue Post'Art n°227 (mai 2024) Chronique de Pierre Raffanel











